dépasser les limites de la collapsologie ? d’accord

Bien sûr qu’il faut dépasser les limites de la collapsologie. Parfaitement d’accord. D’accord mais avec un travail qui respecte les interlocuteurs, qui ne leur fait pas dire ce qu’ils ne disent pas. En gros oui mais avec un dialogue honnête.

Je reprends ici un article de Ballast (on est cité plusieurs fois) et je me permets de mettre quelques commentaires. En gras. Forcément ils sont rapides et fiévreux. Je n’ai franchement pas apprécié la malhonnêteté de l’auteur. Mais je réponds sincèrement et honnêtement. C’est un des principes de la règle d’or. Ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse.

La collapsologie est désormais partout. Son idée-clé ? L’effondrement de notre civilisation thermo-industrielle, bâtie sur les énergies fossiles (charbon, gaz, pétrole…), est inéluctable à plus ou moins court terme (2025 ?, 2050 ?). La chose pourrait même avoir déjà commencé. Resterait donc à œuvrer sans plus tarder au « monde d’après » — pour son porte-voix le plus fameux, l’ingénieur agronome Pablo Servigne, cela implique notamment de fonder un tissu communautaire « résilient » (capable de tenir, de résister, de s’autosuffire). L’inspiration libertaire des uns se frotte à l’individualisme des autres, connus sous le nom de survivalistes : parfois, tout cela se mélange.

Il doit bien exister une dizaine de tribu de collapsologues. On peut les catégoriser en pessimistes actif ou passifs et optimistes actifs et passifs. Lorsqu’on regarde les études disponibles et qu’on croisse les données on s’aperçoit que le seul point d’accord concerne le diagnostic.

 Si les collapsologues ont le mérite d’avoir accru la visibilité des enjeux climatiques et écologiques, les conséquences politiques qui en découlent sont cependant contestables : c’est la thèse avancée par Jérémie Cravatte, militant du Comité pour l’abolition des dettes illégitimes, dans un livret paru cette année. Il le reprend ici, retravaillé, sous la forme synthétique d’un article.

Quelles conséquences politiques ? Je voudrai bien savoir sur quoi il fonde son analyse. Les forums collapso sont truffés de discours et de références politiques. Et c’est très disparate. Pourquoi ? Parce que chacun vient avec son histoire et ses références. Et comme dans tout milieu militant, chacun à sa petite référence à laquelle il tient par dessus tout. Les gens ne sont pas tous des intellectuels. Ils arrivent par une rencontre ou un livre qui les a marqué. C’est leur référence. Il faut l’accepter.

Un tiers des terres est dégradé. 40 % des océans sont altérés. L’extinction massive en cours est beaucoup plus rapide que les précédentes. Au regard de l’ère préindustrielle, le réchauffement climatique moyen a déjà dépassé + 1 °C : cela signifie qu’il va bientôt entrer dans sa phase d’emballement. La moitié des hydrocarbures (charbon, pétrole et gaz naturel, pour l’essentiel) ont été extraits et brûlés en l’espace de deux siècles. De nombreux minerais et métaux se raréfient. L’air que nous respirons atteint régulièrement des pics de pollution aux effets meurtriers. L’eau potable s’amenuise par régions entières1. La plupart de ces phénomènes s’alimentent entre eux. Un basculement écologique est bel et bien en cours, et celui-ci s’avère irréversible à plus d’un titre. Seule son intensité peut — et doit — être limitée. « Les collapsologues2 » ont contribué à faire connaître cette situation auprès d’un public élargi : ceci constitue un apport précieux. Malheureusement, ils ont ajouté à ces constats essentiels une couche de confusion dont nous nous serions bien passés. Leur analyse, en partie erronée, porte en elle une dépolitisation qui, à son tour, produit des réponses insuffisantes, voire contre-productives.

« Leur analyse, en partie erronée, porte en elle une dépolitisation qui, à son tour, produit des réponses insuffisantes, voire contre-productives. » A aucun moment il ne dira en quoi le discours est erroné et en quoi cela porte une dépolitisation. En quoi c’est contre productif. 

 

Simplifier sous couvert de science

La « collapsologie » est définie par les inventeurs de ce néologisme comme suit :

« L’exercice transdisciplinaire d’étude de l’effondrement de notre civilisation industrielle, et de ce qui pourrait lui succéder, en s’appuyant sur les deux modes cognitifs que sont la raison et l’intuition, et sur des travaux scientifiques reconnus3. » (Pablo Servigne et Raphaël Stevens)

« Une compilation transdisciplinaire, aussi utile soit-elle, ne produit pas en soi un nouveau savoir. »

La « collapsologie » n’est pas une science, mais un discours qui utilise des sciences existantes (biologie, géologie, climatologie, etc.). Comme de nombreuses personnes l’ont fait remarquer, une compilation transdisciplinaire, aussi utile soit-elle, ne produit pas en soi un nouveau savoir. La spécificité des collapsos est davantage d’avoir formulé une extrapolation simpliste des théories sur les systèmes complexes.

Oui et alors. En 5 ans devenir une science. C’est impossible. Elle a de nombreuses lacunes. Mais elle propose un exercice intellectuel intéressant qui s’appelle le décloisonnement et la systémique. Edgar Morin, un des pères de la transdisciplinarité ne s’y est pas trompé.

Ces théories étudient notamment le fait que différents systèmes observés peuvent passer d’un état de fonctionnement simple à un état de fonctionnement compliqué, puis complexe (qu’on ne peut plus nécessairement comprendre, expliquer ni prévoir), puis, enfin — et sous certaines conditions4 —, à un état de tout autre nature : « chaotique » et irréversible. Ce changement de condition se produit au passage d’un seuil de rupture invisible, d’un point de bascule (tipping point), à la suite, parfois, d’une modification mineure. Il en est ainsi, par exemple, du déclenchement d’une avalanche. Les collapsos, dans la lignée de l’anthropologue et historien étasunien Joseph Anthony Tainter5, et d’autres, ont extrapolé cette observation empirique à toutes les sphères de la vie.

Cette extrapolation n’est pas farfelue. il existe de nombreux travaux sur ces questions.  Cela s’appuie sur des théories assez récentes basées sur la stochastique. Et le champs d’application semble s’étendre. En voici deux. Gladwell, M. The Tipping Point: How Little Things Can Make a Big Difference (Little Brown, 2000). ou Lenton T. M. “Early warning of climate tipping points” NATURE CLIMATE CHANGE JULY 2011 www.nature.com/natureclimatechange

 

« C’est le constat que tous les systèmes complexes, hyperconnectés (les organismes, la finance, le climat…), lorsqu’ils sont soumis à des chocs répétés, sont résilients : ils gardent leur fonction, s’adaptent, se transforment… Mais il y a un seuil au-delà duquel ils basculent, où toutes les boucles de rétroaction s’emballent, et alors le système s’effondre brutalement. » (Pablo Servigne)

Les auteurs en question conçoivent les sociétés, économies et marchés comme des « systèmes complexes vivants6 ». Des analogies sont continuellement opérées, à grands coups de métaphores, entre des réalités pourtant incomparables : le système immunitaire d’une personne et le système capitaliste, un « écosystème » donné et Internet…

Je ne vois franchement pas le problème.  Il existe pleins de travaux décrivant l’économie comme un système complexe et qui essaie de créer des analogies entre différents systèmes. Les tentatives sont souvent réductrices parce que les catégories ne sont pas assez fines pour penser les interactions .

https://www.lemonde.fr/technologies/article/2011/04/01/l-economie-comme-science-complexe_1502008_651865.html

Tout le monde pense à partir de catégories. C’est même le principe de la pensée.

Dans son dernier livre, Yves Cochet7, membre de l’Institut Momentum, assimile le passage d’un glaçon de l’état solide à liquide au déclenchement d’une « panique » boursière. Il ne fait aucune référence à ce qui rend possible la formation et l’éclatement de bulles spéculatives : dérégulations bancaires, exigences de rentabilité du capital, politiques désastreuses des banques centrales… Tout cela est neutralisé — c’est-à-dire présenté comme neutre, secondaire — car conçu comme le simple fruit d’un processus de complexification déterministe, mécanique, presque physique (à l’image d’un glaçon qui fond). Ainsi que le fait remarquer Elisabeth Lagasse, doctorante en sociologie, on assiste à une naturalisation de phénomènes sociaux hétérogènes et, par définition, modifiables.

Bien sûr que la pensée est réductrice. Parce qu’elle opère par simplification et catégorisation.  Mais quand un type de gauche (ou de droite ça marche aussi) dit qu’il y a d’un côté les gentils progressistes opprimés qui défendent les vraies valeurs et de l’autre les méchants  conservateurs ou alliés objectifs du capitalisme (les collapsologues) on est dans la réduction totale de l’épaisseur du discours. C’est grosso-modo la thèse de l’article.

 

Il n’y a pas besoin de produire une science pour fournir des analyses et perspectives intéressantes ; il est à déplorer que de nombreux collapsos aient voulu légitimer leur démarche par ce moyen. Les inventeurs du terme « collapsologie » l’ont initialement présenté comme une boutade. Ils étaient pourtant parfaitement conscients du poids que charrie le suffixe « logie » dans nos sociétés et n’ont rien fait pour lever cette ambiguïté dans les médias. On peut légitimement se demander en quoi il s’agissait d’une plaisanterie lorsqu’ils expliquent que leur livre « est bien une proposition de discipline scientifique », quand ils se drapent d’un « Département d’études de COLLapsologie générale et appliquée » (DECOLL) et qu’ils appellent les scientifiques en poste à rédiger, monter des chaires ou organiser des colloques sur cette « nouvelle discipline ». Leurs propos sont le plus souvent formulés de manière à se confirmer eux-mêmes, soutenus par une agrégation de données et de concepts gages de scientificité, mais sans aucune démonstration.

En quoi, ne démontrent-ils rien ? Qu’est-ce qui n’est pas démontré ? Qu’on est dans une situation intenable ?

Malgré cela, ils annoncent ne faire qu’énoncer des constats, des faits, de se borner à décrire l’incendie en cours — tout en refusant les débats publics sur cette base. La boutade devient imposture lorsqu’ils accusent les personnes qui questionnent les raccourcis de leurs raisonnements d’être dans un « déni », de se trouver coincées dans une phase inférieure de leur « prise de conscience ». Certains collapsos ont fini de dévaler cette pente glissante et parlent désormais de « collapsophobes » ou, de façon plus dogmatique encore, de « collapso-sceptiques8 », amalgamant déni des basculements écologiques en cours et critique de leur analyse bien spécifique. Rejeter la contradiction est particulièrement étonnant lorsqu’on prétend s’inscrire dans une démarche scientifique.

J’ai déjà répondu sur la page FB de Ballast

Puisqu’on en est aux modifications, il serait opportun qu’il restitue correctement le terme collapsophobe dans la teneur de la tribune du Monde qu’il cite. « Certains collapsos ont fini de dévaler cette pente glissante et parlent désormais de « collapsophobes » » Il dénature totalement le propos de la tribune. Nous utilisons le néologisme pour indiquer que certaines personnes en découvrant l’éventualité ou l’hypothèse d’un collapse la rejette sur un processus psychologique et pas sur des arguments fondés sur la raison. C’est un rejet épidermique. Cela ne s’applique pas aux critiques structurées qui sont absolument nécessaires. Deux citations, deux déformations des propos. Je trouve cela particulièrement problématique. Je n’ai pas le temps de vérifier les propos des autres auteurs mais je sais ce que j’écris et manifestement, il a décidé de dénaturer nos propos.

 

Un récit sans peuple

« Cette rupture fantasmée détourne de l’essentiel : les conditions matérielles existantes, qui définissent la suite et qui sont ce sur quoi nous avons prise. »Les collapsos ont raison de rappeler les profondes interconnexions et, souvent, les fragilités des chaînes d’approvisionnement à flux tendu, réseaux de communication, centrales énergétiques, modes de transport, systèmes alimentaires… dont dépend actuellement une partie conséquente de la population mondiale. En revanche, ils ont tort de présenter la situation à venir comme un grand effondrement.

 

Alors là, je sais pas qui il a lu mais j’ai vu probablement autant de scénarios d’effondrement  que de collapsologues. L’imagination humaine est sans limite. Certains parlent de griller à petit feu. D’autres d’effondrement en tâche de léopard. D’autres de falaise de Sénèque. C’est marrant cette manie des gens qui pensent être la vraie gauche moralement supérieure de projeter leurs propres représentations sur les autres.

Cet effondrement inéluctable serait systémique, global, total, final, ultime, mondial, généralisé… Il y aura — il y a — des événements majeurs, des accélérations exponentielles, des catastrophes inconcevables qui en entraîneront d’autres ; dans 10 ans, la Terre n’aura déjà plus rien à voir avec celle d’aujourd’hui. « Mais cette fois-ci, c’est différent » : en effet. Il n’y a toutefois pas à attendre de grand « big one », le point de rupture imaginaire qui nous ferait basculer dans un autre monde, dans un autre état. Les choses se font dans une continuité, sans interrupteur, sans table rase de l’existant. Il n’y aura pas un gigantesque effet domino généralisé (la « perfect storm ») — lequel, dans l’analyse effondriste, n’est d’ailleurs jamais détaillé ni décomposé jusqu’au bout : il y en a de nombreux, diversifiés. Cela peut être rassurant de penser avoir saisi l’ensemble des basculements en cours avec un unique récit totalisant, mais la réalité s’avère autrement plus complexe. On pourrait objecter que, si certains se perdent à dater « l’événement » (Cochet le voit d’ici 2030), la plupart nuancent leur propos en spécifiant à l’occasion qu’il s’agit d’un processus diffus, étalé dans le temps et l’espace, hétérogène (Pablo Servigne et Raphaël Stevens). D’autres, encore, que leur pertinence range dans l’exception, lèvent presque entièrement la confusion (Corinne Morel Darleux). Le problème ? Tout et son contraire sont avancés : une fois, ce fameux effondrement serait déjà en cours ; une autre, il aurait probablement lieu avant 2025, et de manière certaine avant 2030… Pareilles nuances pèsent peu face au message principal que le public retient.

 

Pour savoir ce que le public retient, il faudrait peut-être l’interroger. Quand on regarde les sondages existants (collapse ou pas) la majorité du grand public projette des crises majeures dans une espace de temps compris entre 5 et 25 ans. Ce n’es pas lié au collapse ou à la collapsologie.  Il y a une inquiétude généralisée. Une sorte de perte de confiance dans la narration dominante du progrès. La collapsologie le met en exergue. C’est imaginaire contre imaginaire.

 

« Pour un public de plus en plus large, la question n’est plus de savoir si le collapse va arriver, mais quand. » (Dylan Michot, Loic Steffan et Pierre-Eric Sutter — OBVECO)

J’ai signalé la malhonnêteté intellectuelle. La phrase avait été tronquée. On avait enlevé le début et ça donnait ça.  la question n’est plus de savoir si le collapse va arriver, mais quand. » (Dylan Michot, Loic Steffan et Pierre-Eric Sutter — OBVECO)

 

« Et si le terrible effondrement général de notre civilisation, le collapse dont tout le monde parle en ce moment, avait vraiment lieu bientôt ? » (CANAL+)

Cette rupture fantasmée9 détourne de l’essentiel : les conditions matérielles existantes, qui définissent la suite et qui sont ce sur quoi nous avons prise. La capacité à faire face aux catastrophes dépend en grande partie des choix de société, eux-mêmes traversés de conflits. Ces choix sont en mouvement (des priorités faites et défaites) ; c’est cela que le discours fourre-tout de l’effondrement tend à invisibiliser10. C’est un « récit sans peuple ».

 

C’est comme si je n’avais pas écrit que la collapsologie réhabilite le politique. Ce comme si les résultats de notre étude nationale de l’obvéco ne montrait pas que les gens conscient d’un potentiel collapse sont beaucoup proactif dans leur comportement écologique, dans leurs choix sociaux.  Bien sûr qu’il y a un peuple. Il y a de nombreux slogan « fin du mois, fin du monde même combat ». A Lilles lors d’un colloque des chercheurs en sociologie ont montré que la question sociale émerge de ces réflexions collapsologiques.

Les rapports sociaux sont institués dans les sociétés et dans les esprits (sous forme de représentations sociales, de normes et d’interdits). La conscience, en tant qu’action consistant à donner du sens au monde, procède en utilisant le langage. Les mots, ainsi posés sur les choses permettent de définir notre environnement. Schématiquement, le langage permet de rendre compte de notre environnement de deux manières : d’une part, il peut être utilisé pour produire des connaissances scientifiques ; d’autre part, il permet d’exprimer notre imagination. Le langage et l’imagination ont une fonction symbolique en tant qu’ils permettent de donner une signification à chaque chose. Or l’imaginaire accède au statut de « réel » au sein d’une société. Godelier nous montre que notre vision du monde se fonde sur des représentations sociales produites individuellement (par le biais du langage et de l’imagination) mais particulièrement influencées par des institutions sociales et politiques et la langue. Le réel est donc d’abord un ensemble d’éléments imaginés qui sont devenus réels au point que l’on en oublie qu’ils auraient pu ne pas être. Et la collapsologie (dans la charge symbolique qu’elle possède) possède cette propriété de dévoiler le fait que nous sommes potentiellement prisonnier d’une narration liée à la croissance, à un rapport à la nature qui doit être questionné. Cela permet de réhabiliter la pensée de Gorz, de Polanyi sur l’encastrement nécessaire de l’économie dans le social ou encore la réflexion d’Ostrom sur les communs.

 

 

 

Une invitation ambiguë à l’acceptation

À la potentielle angoisse qui accompagne la prise de conscience de la situation écologique (« solastalgie », ou écoanxiété), les collapsos en ajoutent une seconde, aussi inutile qu’injustifiée : toutes les choses qui nous entourent pourraient s’écrouler d’un bloc, comme un bâtiment, sans prise aucune dessus11. Puisque cette narration est présentée comme le fruit d’une observation scientifique, cela suscite deux fois plus de dégâts. Ils nous invitent ensuite à cheminer au travers d’un processus de deuil (sidération → déni → colère → marchandage → dépression → acceptation). S’agit-il de faire le deuil d’un climat tempéré, de la majorité des espèces vivantes, des services publics ? À nouveau, il s’agit confusément d’un peu tout cela à la fois — sans précision.

 

Je trouve c’est idée d’invitation à l’acceptation étrange. On dirait qu’il n’a aucune connaissance en psychologie et en psychologie sociale. Parce que ça ne marche pas comme ça.  Il y a des gens qui acceptent et d’autres non. Mais ce n’est pas le discours qui génère l’acceptation ou non. C’est une combinaison complexe entre personnalité, représentations, éducation, culture politique et opportunité d’action.

 

 

« La seule action, pour un humain vivant dans un pays riche, qui pourrait avoir un éventuel effet positif sur l’avenir climatique serait qu’il […] ne fasse pas appel à la Sécurité sociale ou à une quelconque assurance collective lorsqu’un problème survient (santé, habitation, accidents divers). » (Vincent Mignerot — Adrastia)12

 

Là, citation tronquée. Je me méfie grave.  Autant je n’apprécie pas certaines conceptions sociales et politiques d’Adrastia  ou de Vincent autant je trouve le procédé étrange. J’ai déjà défendu Vincent, victime du même procédé dans dommage camarade tu te trompes de cible.  On pourrait presque faire un copier-coller tellement le procédé est semblable. 

 

Indépendamment des conditions physiques, inciter à lâcher le principe des soins de santé (ou de tout autre service) collectivisés revient à diminuer radicalement notre « résilience ». Il ne s’agit pas de prétendre que c’est là la proposition formulée par la plupart des collapsos

(si elle n’est pas dominante pourquoi la citer ? parce qu’il sait l’effet qu’elle va laisser)

, mais de souligner que leur narration imprécise englobe bouleversements évitables et inévitables. Si le colibrisme nous convie à faire individuellement notre part plutôt que collectivement le nécessaire, l’effondrisme nous enjoint (individuellement et collectivement) à accepter l’incendie et à préparer la renaissance qui s’ensuivrait. Ce qui brûle dans cet incendie — et, surtout, dans quel ordre — n’est apparemment pas le plus important. Pour toutes ces raisons, les discours collapsos ont en partie provoqué une dépolitisation des enjeux actuels. Cela ne signifie pas qu’ils aient nécessairement engendré une démobilisation. Les réactions sont certainement au moins aussi diversifiées que les publics touchés13. De nombreuses personnes effondrées passent « à l’action »14, mais à quelles actions et qui s’inscrivent dans quels imaginaires ? Pour ne citer qu’un exemple, se préparer à « la fin » de l’électricité15 vers 2035 ou au fait qu’une partie grandissante de la population s’en verra progressivement déconnectée, avec des accès de plus en plus impayables, n’amène pas forcément aux mêmes réponses.

Les écospiritualités

« Si le colibrisme nous convie à faire individuellement notre part plutôt que collectivement le nécessaire, l’effondrisme nous enjoint à accepter l’incendie. »

Une des réponses apportées par certains collapsos réside dans le développement de nos spiritualités pour mieux traverser leur « effondrement » nébuleux. Partager nos angoisses et nos désirs quant à l’avenir de la biosphère, et du monde en général, et en prendre soin ensemble s’avère primordial. Mais il n’est pas seulement question de cela, dans la « collapsosophie16 ». D’une part, la manière dont la proposition est formulée est infantilisante (la société serait dans une phase de « patho-adolescence »)17. De l’autre, elle invite une communauté de consciences, capable d’accueillir le présage, à se préparer à une forme d’apocalypse et — surtout — à une renaissance fantasmée qui y ferait suite. C’est notamment pour cette raison que, dans sa version actuelle, l’effondrisme peut être considéré comme un nouveau millénarisme (Yves Cochet revendique d’ailleurs un « millénarisme laïc18 »). En vérité, aucun renouveau salvateur n’adviendra et tout ne fera qu’empirer si le nécessaire n’est pas fait pour sortir du productivisme et de sa société de classes, lesquels détruisent toute condition de vie sur Terre.

 

Le jugement de valeur sur la proposition écospiritualité infantilisante et de la responsabilité de l’auteur mais n’est pas fondée. Il n’a probablement aucunes connaissances sur le fonctionnement religieux. Je le renvoie à la très bonne thèse de Milena Jugel «Système de croyances et menaces existentielles. Analyse d’un équilibre intégrant les croyances en la fin du monde. » Face à des situations jugées périlleuses, l’homme a toujours mis en place des systèmes de croyances. Les croyances sont souvent un système ordonné de production de sens qui permet de . Justifier, prédire et ordonner le monde. C’est un des mécanismes majeurs d’élaboration et de maintien du sens. Dans cette acception son discours est tout autant une croyance qui n’a strictement aucune espèce de supériorité. La condescendance exprimée envers les autres en est d’autant plus risible. La religion ou la spiritualité ont précisément ce rôle. La religion est perçue par pas mal d’auteurs comme l’un des meilleurs boucliers pour lutter contre l’angoisse de mort (e.g. Becker, 1973 ; Jonas & Fisher, 2006). En effet la religion fournit de manière très directe un discours sur la mort (Altemeyer & Hunsberger, 1992), la rendant explicitement rassurante car plus juste, plus contrôlable et moins définitive que les discours séculiers.

 Le discours collapsologue est souvent assimilé à un discours millénariste ou a une CFM (croyance en la fin du monde). Or il ne fonctionne pas pareil. La « fin du monde » est une peur très ancienne, dont la particularité est d’être présente dans toutes les cultures, à tous les moments de l’Histoire, sans cesse renouvelée et adaptée aux changements de société (pour une revue complète, voir Boia, 1999). C’est probablement pour conjurer cette crainte du future que les dieux et les religions ont été « inventés ».

 Il y a des différences fondamentales. Les CFM reposent sur un récit eschatologique généralement structuré en trois séquences.
– La première se caractérise par un désordre, des dégradations voire du chaos.
– La deuxième met en scène un combat entre le bien et le mal qui s’achève par la victoire du bien.
– Le jugement final, troisième et dernière séquence, propose une salvation vers une nouvelle vie à ceux qui ont respecté les préceptes de la croyance porteuse de l’eschatologie. Il y a donc un “après la fin du monde“ régénérateur pour les adeptes de la croyance, et non pour les autres.

Le seul point commun est la première étape. Mais franchement pour le reste on voit bien que la collapsologie ne risque pas d’emporter une quelconque adhésion. Pas de régénération et pas de comportement vertueux susceptible de sauver individuellement des adeptes. Pas de justice en somme. Cependant ce discours scientifique sur les catastrophes peut être porteur d’action et d’espoir puisqu’il incite à agir avant qu’il ne soit trop tard. On le constate dans les résultats de l’Obvéco puisque les connaisseurs de la collapsologie sont beaucoup plus actifs.
A noter : malgré le discours rationaliste de notre époque, l’Obveco relève que 49 % des collapsonautes développent « une réflexion philosophique ou spirituelle nouvelle ».  C’est normal car il s’agit d’un mécanisme de défense qu’on n’a pas à juger.

 

 

L’éloge de la fuite

Une autre proposition majeure est de fonder et renforcer de petites communautés résilientes, des écovillages. Cela pourrait s’avérer une piste pertinente si elle posait la question des luttes nécessaires à sa généralisation, mais les collapsos ne s’encombrent pas de ce détail.

 

J’aimerai qu’il démontre en quoi les collapsos ne s’encombrent pas de ce détail. La suite du monde et les communes imaginés, c’est vaguement dans la mouvance collapso, il me semble. Il existe de très nombreuses réflexions. Après, s’il considère que les collapso très divers ont le tort de ne pas tous avoir la même conception de la lutte que lui forcément…..

 

Le paroxysme de la fuite sans construction de réponses collectives s’illustre dans le survivalisme19. Sa philosophie ? Se débrouiller sans l’État, ou plus exactement sans Sécurité sociale ni services publics — alors même que ce sont là des outils de résilience construits par les mouvements sociaux. Les récits élaborés par la majorité des collapsos réduisent volontiers la notion d’entraide aux rapports interindividuels, voire au « clan » ou à la « famille ». Cela n’a rien à voir avec le potentiel de la solidarité d’un corps social. Le survivalisme est l’une des réponses que les grands médias mettent sous les projecteurs — certains collapsos aussi (appelant même à faire des alliances). Se réapproprier (ensemble) des savoir-faire essentiels dont nous avons été coupé·e·s est utile, à l’évidence : premiers secours, feu, confection d’abris, conservation d’aliments, cueillette, recherche et purification d’eau, production et stockage de petites quantités d’énergie, autodéfense, grimpe en extérieur, etc. Mais ces techniques peuvent s’apprendre en dehors des milieux survivalistes — dont l’idéologie ne se limite pas qu’à cela. C’est d’abord une manière d’appréhender le monde, et ce n’est pas un hasard si celle-ci est d’origine libertarienne.

 

Il est assez vrai qu’il y a un tropisme individualiste (mais il parcourt toute la société, on ne peut quand même pas s’étonner de le retrouver dans la collapso). Il est aussi vrai qu’il y a beaucoup de survivalistes qui s’intéressent à la collapso et essaient de « vendre » leur vision du monde. Mais les mecs de gauche font la même chose. Après chacun selon sa vision du monde. . Il est aussi vrai qu’il faut interroger le corps social. Mais, il n’est pas le seul à le faire. Souvent quand les gens m’interrogent et me demandent pourquoi je ne vis normalement et je ne cherche pas à m’isoler. Je réponds que j’étudie la collapsologie plus que je ne le suis et je réponds ensuite que notre sort est collectif. Il faut penser le corps social. Et que c’est collectivement que nous nous en sortirons ou pas.

 

 

Son but est de répondre à l’angoisse de mourir ou de souffrir à cause des autres. Il n’est pas d’affronter les problèmes collectivement mais de les fuir dans l’illusion de pouvoir devenir un « surhomme » face à la fin du monde. Il ne s’agit pas de décider dans quelle société on veut vivre ou mourir avec dignité20, mais de chercher à survivre à tout prix. Le survivalisme touche aujourd’hui un public bien plus large que les libertariens d’extrême droite (environ 10 000 visiteurs lors du deuxième salon de Paris en mars dernier) ; en quoi cela serait-il matière à réjouissance ? Le phénomène alimente surtout un énorme marché en plein essor, et ce dernier n’a rien d’écologique. En prime, il nourrit lui aussi le fantasme de pouvoir participer à une renaissance « post-effondrement », avec, en bonus, la prophétie potentiellement autoréalisatrice de la guerre du tous contre tous.

 

 

Quelle politique de l’effondrement ?

Nombre de collapsos ressortent la vieille chimère selon laquelle la situation actuelle transcenderait toutes les idéologies. Le clivage ne serait plus entre courants émancipateurs et réactionnaires, mais entre personnes conscientes et inconscientes (sic) (d’aucuns préfèrent dire entre « terrestres » et « modernes » hors-sol)21.

 

Là aussi je ne sais pas d’où il sort ça. Je l’ai déjà dit. Il y a et y aura toujours des clivages. Au passage puisqu’il cite Latour en note et puisqu’il m’associe à la collapsologie (que je me contente d’étudier et qui est beaucoup plus riche, diverse et fascinante que ce qu’il en dit) je signale que j’ai fait un résumé du livre pour que les gens qui se posent ces questions politiques.

 

Sauf que l’on ne se rassemble pas uniquement sur une base de constats que l’on pense partager, mais aussi sur des valeurs et des projets de société. Séparer artificiellement « la question écologique » des autres et décider qu’elle serait « prioritaire », c’est nier le fait que nos relations au reste du vivant dépendent de nos rapports entre êtres humain·e·s (dont les oppressions et exploitations patriarcales et coloniales). Cette posture naïve explique pour partie pourquoi les collapsos les plus connus (Chapelle, Servigne et Stevens — qui ont diffusé leurs livres à plus de 130 000 exemplaires) ne semblent pas voir le problème qu’il y a à se référer au survivaliste d’extrême droite Piero San Giorgio22, voire à promouvoir le complotiste xénophobe Dmitry Orlov23, sans jamais préciser nulle part le projet politique porté par ces derniers24. Tout ce qui compte est qu’ils abondent dans leur sens sur le récit de « l’effondrement » civilisationnel.

« Séparer artificiellement la question écologique des autres et décider qu’elle serait prioritaire, c’est nier le fait que nos relations au reste du vivant dépendent de nos rapports entre êtres humain·e·s. »

Ce sur quoi les collapsos ont décidé de mettre l’accent dans leurs discours — peurs individuelles, dépossession en vrac, impasses et verrouillages, acceptation — pourrait favoriser l’élaboration d’une politique de l’effondrement catastrophique par le haut. Une partie conséquente de la population serait ainsi en mesure d’encourager des mesures injustifiables (dont le rationnement de personnes précarisées, déjà en cours) dans l’illusion de pouvoir maintenir des semblants de privilèges le plus longtemps possible. Le champ lexical de la « mobilisation générale » et des « efforts de guerre » est d’ailleurs de plus en plus mobilisé par les collapsos, sans jamais préciser de quels « efforts » il est question ni au service de qui. L’historien Jean-Baptiste Fressoz rappelle à juste titre les origines militaires et industrielles, voire simplement réactionnaires, des discours effondristes. Cela ne signifie pas que les collapsos en question le soient eux-mêmes, mais que leurs propos peuvent ravitailler une approche gestionnaire de la société25.

« En analysant finement les réactions des Français à la narration du collapse, les scientifiques pourront offrir aux décideurs publics et privés un panorama objectivé et dépassionné des représentations du collapse en présence, permettant d’agir avec la plus grande pertinence. » (Dylan Michot, Loic Steffan et Pierre-Eric Sutter)

 

Bon j’ai compris, on est les méchants. Il ne sait pas qui on est , d’où on parle, mais on est les méchants.  J’aime bien comment il aborde le propos. Oui, je suis pour la gestion et je l’assume. Précisément parce que je crois au corps social, aux questions politiques et au choix de société. Je voudrai rappeler à ce monsieur que Jaurès fondait une coopérative ouvrière. De même que Godin ou d’autres. L’entreprise et la gestion ce n’est pas forcément le mal absolu. Cela dépend, de ce que l’on met dernière les notions de gestion. De plus épris de personnalisme anarchiste chrétien, je me méfie des pensées globalisantes et sectaires telle qu’il semble les développer. Ce texte pue le sectarisme à plein nez.

J’en profite pour lui rappeler la lettre de Proudhon a Marx et Engel qui annonce en substance la totalitarisme dans lequel ne pourra que tomber leur vision du monde. Notre auteur devrait la lire et la relire attentivement. Et s’en imprégner.  

« en un mot, je fais profession avec le public, d’un anti-dogmatisme économique, presque absolu. Cherchons ensemble, si vous voulez, les lois de la société, le mode dont ces lois se réalisent, le progrès suivant lequel nous parvenons à les découvrir ; mais, pour Dieu ! après avoir démoli tous les dogmatismes à priori, ne songeons point à notre tour, à endoctriner le peuple ; ne tombons pas dans la contradiction de votre compatriote Martin Luther, qui, après avoir renversé la théologie catholique, se mit aussitôt, à grand renfort d’excommunications et d’anathèmes, à fonder une théologie protestante. Depuis trois siècles, l’Allemagne n’est occupée que de détruire le replâtrage de M. Luther ; ne taillons pas au genre humain une nouvelle besogne par de nouveaux gâchis. J’applaudis de tout mon cœur à votre pensée de produire au jour toutes les opinions ; faisons-nous une bonne et loyale polémique ; donnons au monde l’exemple d’une tolérance savante et prévoyante, mais, parce que nous sommes à la tête d’un mouvement, ne nous faisons pas les chefs d’une nouvelle intolérance, ne nous posons pas en apôtres d’une nouvelle religion ; cette religion fût-elle la religion de la logique, la religion de la raison. Accueillons, encourageons toutes les protestations ; flétrissons toutes les exclusions, tous les mysticismes ; ne regardons jamais une question comme épuisée, et quand nous aurons usé jusqu’à notre dernier argument, recommençons s’il faut, avec l’éloquence et l’ironie. À cette condition, j’entrerai avec plaisir dans votre association, sinon, non ! »

 

Plusieurs d’entre les collapsos se félicitent d’ailleurs d’être invités à partager analyses et conseils auprès du patronat ou de hautes sphères de l’État consacrées à la gestion « des risques ».

Dépasser la critique de la « collapsologie »

Redisons-le : les apports des collapsos — et disons à nouveau que cette mention ne concerne pas uniquement celles et ceux qui se présentent ainsi (voir note 2) — sont nombreux. Avoir tranché avec le mythe du Progrès (Raphaël Stevens) ; participé à informer un public large du caractère habitable ou non de la planète (Dominique Bourg) ; décrit le phénomène des gated communities (Renaud Duterme) ; partagé des expériences concrètes desquelles s’inspirer (Agnès Sinaï) ; démontré en quoi la haute technologie ne constitue pas une réponse faisable ni souhaitable (Philippe Bihouix) ; bousculé les horizons de nombreuses associations ou mouvements et y avoir provoqué des débats décisifs (Pablo Servigne) ; traduit des données abondantes et compliquées en un langage clair (Vincent Mignerot) ; déconstruit l’économisme hors-sol (Gaël Giraud) ; invité, comme d’autres avant eux, à une relation de sujets à sujets avec le reste du vivant (Julien Wosnitza) ; mis en avant la puissance des liens face à la fragilité de l’isolement (Gauthier Chapelle) ; rappelé la finitude de toute chose (Laurent Testot) ; redonné sa place au doute (Corinne Morel Darleux) ; insisté sur la nécessité de produire une multiplicité de récits (Arthur Keller). Et l’on pourrait poursuivre.

Le rôle de la critique n’est pas de s’égarer dans une opposition de chapelles — notre public-cible étant à ce titre moins les collapsos que les effondré·e·s — mais d’identifier les limites, ainsi que les éventuelles dérives, à dépasser.

La citation des effondré.e.s est intéressante. On voit le courant et la filiation qui se dessine. Je critique vivement cette définition car elle enferme les gens qui découvre la collapsologie dans une posture dont ils ne pourraient pas sortir. Le terme est bien plus infantilisant que celui que collapsologue.  C’est surtout un problème de terminologie pour apparaître dans les moteurs de recherche. Plus une question d’ego que de fond.

D’aucuns estiment que la critique ou le débat serait une perte de temps ou, pire, que cela « diviserait ». Cette vision, assez répandue chez les effondristes, refuse de voir que cette pratique élémentaire permet de s’élever mutuellement, de cultiver une nécessaire diversité et d’éviter de répéter les mêmes erreurs. Les collapsos les plus connus ont laissé entendre à plusieurs reprises que leur prochain chantier était la « collapso-praxis » (politiques de l’effondrement incluses). S’ils prennent en compte les nombreuses critiques reçues, on ne pourra que s’en réjouir — n’y comptons pas trop. L’enjeu, pour nous, réside davantage dans la construction de nos propres récits : plus concrets et précis qu’un effondrement globalisé et indifférencié. De plus en plus d’effondré·e·s s’y adonnent : une suite logique heureuse26.

 

Bon la note 26 est assez éclairante (ben oui je les ai lu). En gros, il faut être marxiste, décolonnial, etc pour être conforme. L’auteur appartient ou pense appartenir à une petite intelligentsia qui se pense supérieure et correctement structurée et qui regarde en surplomb la plèbe. Je jargonne au max et tous des cons à part moi.   

 

Non le débat n’est jamais une perte de temps. Mais le débat nécessite de respecter des règles du jeu de la controverse. Qu’est-ce qui permet à l’auteur de penser qu’il ne faut pas compter que les leaders de la collapsologie tiennent compte des critiques ? Je lui retourne le compliment. Prendra-t-il en compte les critiques sur l’aspect partisan et parfois malhonnête de son propos ?

 

 

Ne plus voir la grève générale ou les nombreux soulèvements populaires en cours comme un symptôme de « l’effondrement » catastrophique, indépendamment de leurs contenus, causes et effets, mais comme un moyen-clé à notre disposition pour arrêter la machine, décider de ce que l’on relance ou non, et comment. Ne plus mobiliser des imaginaires et des scénarios focalisés sur une partie minoritaire de la population mondiale (avions, voitures individuelles, supermarchés…), inquiète de la fin de l’extractivisme, mais se demander comment y mettre un terme et le remplacer par de la réciprocité. Ne plus présenter la prochaine crise financière comme l’étincelle de « l’effondrement généralisé » mais comme un enjeu réel, à l’heure où les plus grands actionnaires sont en train de protéger leurs actifs des faillites à venir. Décortiquer sérieusement nos dépendances actuelles, les liens soi-disant « inextricables » qui nous piègent, nos autonomies brisées, et en tirer les conséquences. Continuer d’identifier ce à quoi nous tenons, ce que nous voudrions sauver et ce que nous lâchons. Ce que cela signifie comme luttes à mener.

 

 

Ca je suis d’accord. Au passage si l’auteur état à minima attentif, il aurait vu que j’ai produit ça qui est plus ou moins l’ancêtre des gilets jaunes et qu’un des premiers articles positifs sur les gilets jaunes (dans La Vie) était écrit par votre serviteur.  Bon je sais La Vie c’est pas franchement un journal conforme de la vraie gauche qui sait mieux que tout le monde ce qu’il faut faire parce qu’elle est le bien le beau et le juste.