Comme chaque année, j’attends que l’équipe municipale en place fasse une présentation correcte du Débat d’Orientation Budgétaire et que l’opposition fasse son travail de critique constructive au lieu de grandes envolées lyriques. A chaque fois j’espère aussi que la presse arrivera à lire et à comprendre les documents et à faire une restitution correcte des débats. Comme chaque année je suis déçu et je me dis que la grande perdante de cet exercice est la démocratie. Quand on ne comprend pas où va l’argent et quoi il sert on est en colère et on refuse les impôts. La colère est souvent mauvaise conseillère.
Et comme chaque année, parce que ce que je pense que la seule démocratie possible est une démocratie éclairée par des débats budgétaires de qualité, je finis par faire un commentaire du budget de la commune en espérant que quelques personnes comprendront.
Une fois de plus sur les quarante pages du document, toutes les informations sont éclatées et il n’y a ni récapitulatif des dépenses, ni récapitulatif des recettes. Le DOB commence par 16 pages de graphiques et d’informations totalement inutiles présentées de la sorte. Les commentaires et les choix des infos semblent indiquer un copier coller et on dirait au vu des commentaires que les rédacteurs ne comprennent pas ce qu’ils écrivent.
On peut les résumer ainsi :
- Après une baisse importante l’activité et la croissance repart et l’emploi a limité la casse.
- Les prêts garantis de l’Etat (140 Mds) et le fond de solidarité ont fait le travail. L’Etat a injecté autour de 70 Mds d’€ en 2020 et 2021 pour éviter le pire par des mesures de soutiens.
- Le Plan de relance injectera 20 Mds dans l’économie en 2022 après 20 milliards en 2021.
- Le revenu disponible des ménages a globalement été préservé.
- Globalement pour le bloc communal dans son ensemble les recettes ont baissé de 3 Mds et les dépenses de 1 Mds. Sachant que les dépenses sont de 96 milliards et les recettes de 114 milliards (la différence représente de l’investissement et de l’épargne en première approximation) l’impact est limité.
- L’inflation et l’actualisation des bases locatives fait que les impôts locaux vont monter. C’était prévu. C’est le mécanisme classique. Ca va faire 2.5 % au minimum. Pas de quoi feindre la surprise. C’est meme l’article 1518 bis du CGI, qui donne la formule. Il se calcule par majoration d’un coefficient égal à 1 auquel on y ajoute la valeur de l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) du mois de novembre de l’année précédente.
- Idem pour le smic et le salaire des agents. Surtout quand les salaires dépassent la moitié des dépenses de la commune. Donc en conséquence la masse salariale augmente fortement. Plus 1 million pour dépasser les 31 millions.
- Il y a ensuite quelques indications intéressante. L’Etat va débloquer près de 1,5 Mds pour le bloc communal.
750 millions pour l’investissement local entre différents dispositifs. 100 millions pour la rénovation thermique des bâtiments et 400 millions pour les transports en commun en sites propres et 350 millions de contrat de relance et de transition écologique. Espérons que la ville sera assez intelligente pour saisir ces opportunités et investir dans ces domaines. En général, elle est assez mauvaise comparativement à d’autres villes de sa strate pour aller chercher des subventions. - La dernière information intéressante (selon moi) est d’ordre technique. La présentation des comptes va passer de la M14 à la M57. Ca devrait être plus clair et détaillé. Il y aura plus de choses à analyser.
Sinon le commentaire est rapide. Les dotations de l’Etat sont stables.
Idem pour les autres dotations. Elles viennent en financement du centre d’action sociale et du périscolaire entre autres.
Sans surprise par rapport à ce qui est dit précédemment les impôts augmentent de 1 million.
Sans surprise les charges de personnel augmentent. On a soit des agents biens payés et valorisés soit beaucoup de monde mais il est difficile d’avoir les deux.
L’essentiel de l’écart sur les produits de fonctionnement s’explique par un remboursement de l’ARS pour le centre de vaccination; (600 K€).
Les charges à caractère général du chapitre 11 restent autour de 22 % et trop hautes de 2 à 3 point, c’est à dire d’au moins 2 millions par rapport aux normes de gestion.
La politique de saupoudrage aux associations perdure.
Le résultat de tout cela est tristement prévisible. les recettes d’investissement sont faibles
La chaine d’épargne qui permet d’investir est faible et continue de se dégrader. Elle devrait être autour de 10 millions compte tenu des sommes en jeu si j’en crois les ratios préconisés dans les livres spécialisés.
Le faible niveau d’investissement est financé par la dette qui continue de rouler et qui doit son niveau à des taux d’intérêt bas. Heureusement les emprunts souscrits ne sont pas dangereux. 88 % sont à taux fixe et 91 % classés 1a dans la charte de référence Gissler. Là c’est plus bien. Mais hélas les taux vont remonter.
Et le résultat prévisible et annoncé. L’épargne brute est 30 % plus basse que les villes de la strate et les dépenses d’équipement sont aussi 30 % plus basse que la strate.
Une ville qui n’investit pas est une ville qui ne prépare pas l’avenir. L’avenir sera problématique car les recettes continuent à progresser moins vite que les dépenses. Donc l’épargne se réduit et l’investissement est financé par l’endettement qui ne recule pas et ne reculera plus car les taux d’intérêt remontent. Business as usual sans imagination.
Les dernières lignes du DOB sont sybillines et intéressantes : « Enfin, l’année 2022 continuera d’être marquée par un contexte national et mondial atypique (flambée du prix des fournitures et de l’énergie, réformes gouvernementales) qui vont venir confirmer la tendance dessinée en 2021 mais qui rendent difficilement lisible la projection 2022. »
Or compte tenu des données avancées on peut déduire que ces blocages sur les fournitures et l’énergie n’ont pas été intégré aux prévisions. Le dernier variant « Omicron » du Covid non plus. Comme l’an dernier d’ailleurs.
Vous pouvez me remercier, je vous ai économisé 40 pages.