Barrières psychologiques pour agir pour le climat

Ce document est une traduction libre de The Dragons of Inaction    La traduction a été reprise et améliorée par Mathieu Farges. Merci à lui.

Les dragons de l’inaction: barrières psychologiques qui empêchent la lutte contre le changement climatique.

La plupart des gens pensent que le changement climatique et la soutenabilité sont des problèmes importants. Mais parmi ceux qui ont des comportements très émissifs, trop peu  s’engagent dans des comportements qui, à l’inverse, pourraient atténuer de manière significative le flux croissant des gaz à effet de serre et des autres problèmes environnementaux. Pourquoi donc ?
Des barrières structurelles, telle que des infrastructures non adaptées à un mode de vie décarboné, composent une partie de la réponse, mais les barrières psychologiques entravent également les comportements qui faciliteraient l’atténuation, l’adaptation ou un comportement soutenable. Bien que de nombreux individus soient engagés dans des actions qui vont dans le bon sens, la plupart pourrait faire plus, mais ils sont entravés par sept catégories de barrières psychologiques ou « dragons de l’inaction » : une connaissance limitée des problèmes, des visions idéologiques du monde qui empêchent des comportements ou des attitudes pro environnementales, la comparaison avec d’autres personnes clefs, les coûts irrécupérables et les dynamiques comportementales, le discrédit des experts et des autorités, les risques perçus du changements, et des changements considérés comme positifs mais inadéquats. Les barrières structurelles doivent être levées dans la mesure du possible, mais cela ne sera probablement pas suffisant. Les psychologues doivent travailler avec d’autres scientifiques, experts techniques et décideurs pour aider les citoyens à surmonter ces barrières psychologiques.

 

Mots clefs : Changement climatique, barrières, obstacles, réchauffement climatique, soutenabilité.

It was our fault, and our very great fault— and now we must turn it to use.
We have forty million reasons for failure, but not a single excuse.
So the more we work and the less we talk the better results we shall get…

—Rudyard Kipling, “The Lesson,” 1901

Si tant de gens sont préoccupés par le changement climatique, l’environnement et la soutenabilité de nos systèmes, pourquoi si peu d’entre-nous faisons ce qu’il faut pour améliorer la situation ? Bien sûr, de nombreuses personnes et organisations prennent des mesures dans ce sens, et certaines ont déjà pris de nombreuses mesures. Cependant, dans l’ensemble, les humains continuent de produire des quantités massives de gaz à effet de serre qui continueront d’alimenter le changement climatique, et nous demeurons engagés dans des comportements destructeurs pour l’environnement.

Dans certains cas, les raisons de ces erreurs comportementales sont structurelles et échappent donc au contrôle raisonnable d’un individu. Par exemple, de faibles revenus limitent considérablement la capacité d’achat de panneaux solaires. Habiter dans une zone rurale signifie généralement que l’absence de transports en commun rend la voiture nécessaire, et vivre dans une région où les hivers sont vigoureux génère de la consommation d’énergie. Cependant, pour l’immense majorité de ceux qui n’ont pas ces barrières structurelles, l’adoption de choix et de comportements plus respectueux de l’environnement est possible, mais le niveau d’effort n’est suffisant pour endiguer le flux croissant de gaz à effet de serre et les autres dommages environnementaux. Ainsi, la question demeure: Qu’est-ce qui empêche une plus grande généralisation des actions d’atténuation, d’adaptation et de durabilité, parmi les individus pour lesquels de telles actions sont pourtant faisables?

Cet article étudie sept barrières psychologiques globales comme facteurs d’influence qui limitent le changement de comportement vis-à-vis de l’environnement [1]. Ces barrières représentent l’explication que je donne au mystère entourant le fossé important entre l’attitude («Je suis d’accord que c’est la meilleure ligne de conduite») et le comportement («mais je ne le fais pas») en ce qui concerne les problèmes environnementaux. Certains des obstacles sont reconnus dans un domaine de recherche psychologique ou un autre, mais d’autres ne nous sont pas encore dans notre lexique. Certains ont été étudiés (dans d’autres domaines) beaucoup plus que d’autres. Ces barrières n’ont pas été abordées comme un ensemble, bien que quelques chercheurs en sciences sociales en aient discuté (par exemple, Gifford, 2008, Kollmuss et Agyeman, 2002, Lorenzoni, Nicholson-Cole et Whitmarsh, 2007).

Les barrières psychologiques contre un changement de comportement.

Une fois que l’on commence à regarder, on peut trouver un assez grand nombre d’obstacles psychologiques à une atténuation ou à une adaptation adéquate (neutre en carbone) contre le changement climatique. Cet article classe 29 des «dragons de l’inaction» en sept catégories. La famille des dragons [2] de sept genres avec leurs 29 espèces est présentée dans le tableau 1.

Tableau 1 : Barrières psychologique pour s’adapter au changement climatique et l’atténuer

1. Cognition limitée Cerveau primitif

Ignorance
Torpeur à propos de l’environnement
Incertitude
Sous-estimation par actualisation
Biais d’optimisme
Contrôle comportemental perçu / auto-efficacité

2. Idéologie Représentations du monde
Pouvoirs surnaturels
Technosalvation (sauvetage par la technique)
Justification du statu quo
3. Comparaison à autrui Comparaison sociale
Normes sociales et réseaux personnels
Inégalités perçues
4. Coûts irrécupérables Investissements financiers
Inertie comportementale
Conflit de valeur entre les objectifs et aspirationsManque d’attachement à un lieu
5. Défiance Méfiance
Programme perçu comme insuffisant
Déni
Réactance (préserver sa liberté d’action perçue comme menacée)
6. Risques perçus Fonctionnel
Physique
Financier
Social
Psychologique
Temporel
7. Changement de comportement limité Tokénisme*
Effet rebond

*Le « tokénisme » (effet jeton) fait usuellement référence aux « quota ethniques », critiqués comme un effet « poudre aux yeux » pour faire taire des critiques sans régler le problème – on pense au fameux Token Black de South Park. Ici, en faisant le parallèle avec l’action environnementale, on désigne les actions « poudre aux yeux » qui font croire que l’on agit suffisamment pour le climat, alors que ces actions restent très symboliques et insuffisantes.

L’inaction face au climat ou à l’environnent semble avoir trois grandes phases. L’ignorance pure et simple exclut de fait l’action. Ensuite, si l’on est conscient d’un problème, une variété de processus psychologiques peuvent interférer avec une action efficace. Enfin, une fois qu’une action est entreprise, elle peut être inadéquate parce que le comportement s’estompe, fait trop peu de différence dans l’empreinte carbone de la personne, ou s’avère contre-productif. Les sept catégories d’obstacles sont présentées comme une taxonomie préliminaire – un moyen de commencer un ordonnancement et un regroupement.

Quels sont donc ces « dragons de l’inactions » qui contrecarrent les objectifs largement acceptés mais vagues de la neutralité carbone anthropique pour obtenir la durabilité de nos systèmes ?

  1. Une cognition limitée

Les humains sont notoirement moins rationnels qu’on ait pu le croire (H. Simon, 1957 ; Tversky et Kahneman, 1974). Cela reste aussi vrai  pour penser au changement climatique que dans d’autres domaines. Nous allons présenter certains mécanismes par lesquels la pensée n’est pas totalement rationnelle et comment ils empêchent l’atténuation de nos émissions et notre adaptation.

– Cerveau primitif

Le cerveau humain n’a pas beaucoup évolué depuis des milliers d’années. Au moment où il a atteint son développement physique actuel, avant le développement de l’agriculture, nos ancêtres se préoccupaient principalement de leur environnement immédiat, des dangers immédiats, des ressources exploitables et du temps présent (par exemple, Ornstein & Ehrlich, 1989). Aucun de ces éléments n’est naturellement compatible avec l’inquiétude, au 21ème siècle, au sujet du changement climatique global, qui est lent, habituellement éloigné, et sans rapport avec le bien-être actuel de nous-mêmes et de nos proches. Evidemment, notre cerveau primitif est capable de faire face au changement climatique mondial, mais cela ne lui est pas chose facile.

– Ignorance.
Pour certains, l’ignorance peut être un obstacle à l’action de deux manières principales : ne pas savoir qu’un problème existe et ne pas savoir quoi faire une fois que l’on prend conscience du problème. La plupart des sondages (par exemple, Pew Research Center, 2006) constatent qu’une proportion de répondants répondent «ne sait pas» aux questions sur le changement climatique. Même aujourd’hui, certaines personnes à travers le monde ignorent totalement que le changement climatique est un problème. De toute évidence, ce segment de la population mondiale n’est pas susceptible de prendre des mesures délibérées visant à lutter contre le changement climatique [3].

La deuxième dimension de l’ignorance, qui regroupe la plus grande proportion de la population mondiale consciente du problème, est liée à un manque de connaissances sur la cause et l’ampleur du changement climatique (par exemple, Bord, O’Connor, & Fisher, 2000). Ce manque conduit à ignorer (a) quelles actions spécifiques prendre, (b) comment entreprendre des actions dont on a conscience, et (c) les impacts bénéfiques relatifs des différentes actions. Étant donné que la plupart des gens ne sont pas des experts techniques, ils n’ont généralement pas ou ne connaissent pas l’ampleur relative des impacts bénéfiques de diverses actions.

Le savoir sur ces questions se développe, et nous savons ce qu’il faudrait faire de manière générale (par exemple, Dietz, Gardner, Gilligan, Stern et Vandenbergh, 2009, Gardner et Stern, 2008). Cependant, il reste beaucoup à apprendre, même pour les experts, en partie parce que les réponses ne sont pas toujours universelles (par exemple, une bonne idée à New York peut ne pas en être une à Vancouver) ou évidentes (par exemple, l’agneau néo-zélandais consommé au Royaume-Uni a une empreinte carbone plus faible que celle de l’agneau élevé au Royaume-Uni) et en partie parce que les analyses de cycle de vie des produits sont complexes, notamment à cause du grand nombre d’ingrédients ou de composants dans les produits commercialisés (cf Goleman, 2009). L’ignorance généralisée (mais compréhensible) de l’efficacité différentielle des options possibles freine naturellement l’adoption d’actions liées au climat.

Une autre source d’incertitude provient des messages contradictoires dans les médias. Bien sûr, beaucoup de ces messages sont des traductions simplifiées et compréhensibles de rapports scientifiques, faits de bonne foi par des journalistes. D’autres sont apparemment des démarches bien financées de minimisation des connaissances scientifiques, par des groupes d’intérêts liés aux industries de la production et de l’utilisation des gaz à effet de serre (Hoggan, 2009).

– Torpeur à propos de l’environnement (engourdissement)

Chaque milieu est composé de plus de signaux et d’éléments que ce que les individus peuvent surveiller complètement, donc nous nous focalisons sur certains éléments. Par conséquent, les gens ignorent souvent une grande partie de leur environnement physique, en particulier les aspects qui ne causent aucune difficulté immédiate, et parfois même les aspects qui leur causent le moins de difficultés (Gifford, 1976). Le changement climatique en fait partie, pour de nombreux citoyens: c’est un phénomène qui échappe à l’attention immédiate parce qu’il ne provoque pas de difficultés personnelles immédiates. Les comportements d’atténuation et d’adaptation sont peu probables dans ce cas-là.

Une deuxième forme de torpeur à propos de l’environnement se produit à l’autre extrémité du spectre de stimulus. Lorsque les spectateurs ont vu les même  annonces publicitaires plusieurs fois, l’attention à cet objet se réduit, à mesure que l’accoutumance augmente (Belch, 1982 ; Burke et Edell, 1986). De même, entendre trop souvent des propos sur le changement climatique ou l’environnement, en particulier si le message n’est pas varié, peut entraîner une torpeur face au message et par conséquent une diminution des comportements utiles qui amélioreraient les problèmes.

*– Incertitude

La recherche expérimentale sur les dilemmes liés aux ressources démontre que l’incertitude perçue ou réelle réduit la fréquence du comportement pro-environnemental (par exemple, de Kwaadsteniet, 2007; Hine et Gifford, 1996). Les individus ont tendance à interpréter tout signe d’incertitude, par exemple dans la taille d’un stock de ressources ou dans le taux de régénération de la ressource, comme une raison suffisante pour récolter à un rythme qui favorise l’intérêt personnel plutôt que l’environnement. L’incertitude à propos du changement climatique est aussi très probablement une justification de l’inaction ou du fait de remettre à plus tard l’action liée au changement climatique. Dans le contexte du changement climatique, la présentation des phrases de niveau de confiance très prudemment choisies (telles que « probable » ou « très probable », p.3) dans le rapport d’évaluation 2007 du Groupe intergouvernemental d’experts des Nations Unies sur les changements climatiques (GIEC) ) a conduit de nombreuses personnes à interpréter les expressions comme ayant une plus faible probabilité que ce que les experts du GIEC avaient prévu (Budescu, Broomell, & Por, 2009).

Ainsi, les efforts louables déployés par les scientifiques pour caractériser rigoureusement le degré de certitude sur le changement climatique semblent conduire à une sous-estimation générale du risque de changement climatique de la part du public profane. Pourtant, la réalité scientifique et éthique est qu’un certain degré d’incertitude est un élément incontournable de tout modèle climatique –ou tout modèle, d’ailleurs. Ainsi, les scientifiques du climat se retrouvent avec un problème très complexe: comment présenter honnêtement la probabilité des résultats liés au changement climatique sans promouvoir un optimisme malencontreux de la part du public profane, ce qui ne manquerait pas d’alimenter l’inaction de ce public.

– Sous-estimation par actualisation (discounting)

L’  « actualisation » dans ce sens fait référence à la sous-évaluation des risques éloignés ou futurs. Une étude récente menée auprès de plus de 3 000 personnes dans 18 pays a révélé que des personnes dans 15 pays estimaient que les problèmes environnementaux étaient plus mauvais ailleurs, comparé à chez eux (Gifford, Scannell et al., 2009). Cette étude et d’autres (par exemple, Uzzell, 2000) démontrent qu’une atténuation spatiale des problèmes environnementaux se produit. Bien que les conditions puissent souvent être objectivement pires dans d’autres régions du globe, cette tendance se manifeste même dans des lieux objectivement similaires, par exemple parmi les habitants des villages anglais distants de quelques kilomètres (Musson, 1974). Les gens ont aussi tendance à minimiser les risques environnementaux futurs, mais pas de la même manière que les risques dans d’autres domaines (par exemple, Hendrickx et Nicolaij, 2004) et moins que d’autres risques (Gattig & Hendrickx, 2007). L’évaluation incorrecte du risque peut être encore pire pour le problème du risque environnemental général, qui devrait en fait être vu comme s’aggravant plutôt que minimisé; il devrait s’aggraver dans 25 ans dans pratiquement tous les pays, aux niveaux local, national et mondial (Gifford, Scannell et al., 2009). Cependant, si les conditions sont présumées être pire ailleurs et plus tard, on peut s’attendre à ce que les individus soient moins motivés pour agir contre le changement climatique chez eux et maintenant.

Les sociologues qui étudiaient le comportement déviant de la jeunesse ont proposé une autre forme d’atténuation il y a plus d’un demi-siècle : la théorie de la neutralisation (Sykes & Matza, 1957), une idée préfigurée par Rudyard Kipling dans les lignes qui ouvrent cet article. Pour synthétiser, la théorie de la neutralisation décrit les rationalisations d’une variété de comportements déviants, dont le but est de s’absoudre de la responsabilité. Des recherches récentes ont énuméré 13 de ces rationalisations (McGregor, 2008). Dans la mesure où elles s’appliquent aux actions environnementales et à l’action climatique, plusieurs de ces techniques de neutralisation pourraient être considérées comme une autre forme de minimisation.

– Biais d’optimisme

L’optimisme est généralement une perspective saine et souhaitable qui peut produire des résultats personnels utiles et des merveilles technologiques (par exemple, J. L. Simon, 1981). Cependant, l’optimisme peut être exagéré, au détriment du bien commun. Des preuves considérables suggèrent que les gens sous-estiment les risques personnels, tels que la probabilité d’une crise cardiaque (Weinstein, 1980), mais aussi leurs risques liés à l’environnement, par exemple l’exposition au radon (Weinstein, Klotz et Sandman, 1988), d’autres risques liés à l’environnement (Hatfield et Job, 2001) ou, plus explicitement, 22 dangers étudiés (Pahl, Harris, Todd et Rutter, 2005). Ainsi, on peut raisonnablement prédire que le biais optimiste s’applique aux risques liés au changement climatique, bien que les citoyens du monde s’attendent à ce que les conditions environnementales en général s’aggravent au cours des 25 prochaines années. . . mais pas tellement là où ils vivent eux-mêmes, comparé à d’autres endroits (Gifford, Scannell, et al., 2009).

Contrôle comportemental perçu / auto-efficacité perçue

Parce que le changement climatique est un problème mondial, de nombreuses personnes croient qu’elles ne peuvent rien faire en tant qu’individus. C’est le problème bien connu de l’action collective (Olson, 1965). En langage psychologique, parfois les gens n’agissent pas parce qu’ils pensent qu’ils ont peu de « contrôle comportemental » sur le résultat (par exemple, Ajzen, 1991 ; Huebner et Lipsey, 1981) ou que leurs actions n’auront pas beaucoup d’impact (un manque d’auto-efficacité ; Ajzen, 2002). Le « contrôle comportemental perçu » peut être un facteur d’influence très fort (r = 0,50-60) pour savoir si une personne choisit de prendre un transport public au lieu d’une voiture privée (par exemple, Heath & Gifford, 2002, Kaiser & Gutscher, 2003). Étroitement lié à ce manque perçu de « contrôle comportemental » individuel et d’auto-efficacité,, on trouve le fatalisme, le sentiment que rien ne peut être fait, non seulement par les individus mais par aussi grâce à une action collective (Lorenzoni et al., 2007; O’Connor, Bord, & Fisher, 1998).

 

  1. Idéologies

Certains systèmes de croyances sont si importants qu’ils influencent de nombreux aspects de la vie d’une personne. Parmi ces systèmes, au moins pour certaines personnes, il y a les opinions religieuses et politiques. Les idéologies et visions du monde (par exemple, Dietz, Dan et Shwom, 2007, Dunlad, Van Liere, Mertig et Jones, 2000, O’Connor, Bord et Fisher, 1999) qui comportent des croyances qui s’opposent à l’atténuation du changement climatique et d’autres formes d’actions pro-environnementales constituent de très fortes barrières au changement de comportement.

– Visions du monde

L’un des indices les plus significatifs du déni du réchauffement climatique est la croyance dans le capitalisme de libre-entreprise (par exemple, Heath et Gifford, 2006). Le capitalisme a manifestement produit un mode de vie confortable pour des millions de personnes, mais certains aspects, comme la croyance au laisser-faire pour gérer les communs (Hardin, 1968), ont conduit à la dévastation des pêcheries, des forêts, et des paysages du monde entier. Avoir des conflits d’intérêts avec certaines organisations n’est pas compatible avec l’adoption de comportements vertueux pour le climat (par exemple., Dunlap et McCright, 2008).

– Pouvoirs surnaturels

Certaines personnes prennent peu ou pas de mesures liées au climat parce qu’elles croient qu’une divinité religieuse ou Dame Nature (en tant que divinité séculière) ne les abandonnera pas, ou fera ce qu’elle désire quoi que l’on fasse. Par exemple, des chercheurs qui ont interrogé deux groupes d’Insulaires du Pacifique vivant sur des atolls de très basse altitude menacés par l’élévation du niveau de la mer ont constaté qu’un groupe cherchait déjà des terrains plus élevés en Australie; tandis que l’autre groupe, confiant en l’idée que Dieu ne rompra pas la promesse biblique de ne plus jamais inonder la terre après le déluge que Noé et son entourage subirent, croit que les élévations du niveau de la mer ne les affecteront pas parce qu’il y aura «du feu la prochaine fois» (Mortreux & Barnett, 2009). Des individus plus laïques expriment parfois la croyance que Mère Nature suivra son cours et que les simples mortels ne peuvent l’influencer. Naturellement, une inaction sur le front climatique découle de ces croyances.

 

– Technosalvation (sauvetage par la technique)

L’innovation technique est historiquement connue pour sa remarquable contribution à l’amélioration du niveau de vie. Ceux qui croient en sa capacité à nous aider dans l’atténuation du changement climatique (par exemple, Gifford, 2008, Terwel, Harinck, Elleremers & Daamen, 2009) ou même qui considèrent la technique comme la solution essentielle (par exemple, JL Simon, 1981) partagent leur croyance en sa promesse avec d’autres qui vont plus loin, et croient que la technologie seule (ou presque seule) peut résoudre les problèmes associés au changement climatique (par exemple, les citoyens cités dans Lorenzoni et al., 2007).

Certains experts valorisent fortement la géoingénierie comme étant un outil dans la lutte contre le réchauffement climatique. La société savante IMechE (Institution of Mechanical Engineers)(2009), basée au Royaume-Uni, y croit fortement, et ses deux premières solutions de géoingénierie sont la création d’arbres artificiels et l’enrobage des bâtiments avec des algues. Cependant, même l’Institution of Mechanical Engineers ne préconise pas la géoingénierie seule, mais de concert avec les politiques d’atténuation classiques. Cependant, pour certains citoyens, les croyances trop confiantes en l’efficacité de la technologie semblent constituer un obstacle supplémentaire à des comportements vertueux pour le climat.

– Justification du statu-quo
Un autre système de croyance a été décrit comme la justification du système, c’est à dire la tendance à défendre et à justifier le statu quo sociétal (Feygina, Jost, & Goldsmith, 2010). Quand les citoyens sont assez chanceux pour avoir un style de vie confortable, la tendance à ne pas «faire de vagues» ou, ce qui est peut-être plus important, à ne pas laisser les autres changer la façon dont les choses fonctionnent actuellement, se développe. Une fois de plus, le changement climatique nécessitera des ajustements ; les défenseurs du statu-quo n’adopteront naturellement pas avec enthousiasme des mesures d’atténuation. Il est intéressant, cependant, de noter que Feygina et al. (2010) ont montré que si l’atténuation peut être présentée avec succès comme faisant partie du système actuel, ce manque d’action de la part des principaux bénéficiaires du système actuel peut changer.

  1. Comparaison avec les autres

Les humains sont des animaux très sociaux ; comparer sa situation avec celle des autres est une tendance profondément ancrée. Cette comparaison peut prendre plusieurs formes.

– La comparaison sociale

Les gens comparent régulièrement leurs actions avec celles des autres (Festinger, 1954) et tirent des normes subjectives et comportementale de leurs observations sur ce que doit être la ligne de conduite «appropriée» (par exemple, Heath et Gifford, 2002). Cette tendance est reconnue dans la théorie du comportement planifié (Ajzen, 1991) et dans le modèle valeur-croyance-norme (Stern, 2000), parmi d’autres théories, et a été appliquée à de nombreux comportements et autres  interventions pour des actes pro-environnementaux (p. Ex. Thogersen, 2007, Cialdini, 2003).

– Normes sociales et réseaux personnels.
Les normes sont souvent citées comme une force potentielle de progrès dans les questions environnementales, et elles peuvent l’être (Thogersen, 2008), mais elles peuvent aussi être des forces de blocage. Le pouvoir à double tranchant des normes a été clairement mis en évidence dans une étude concernant l’utilisation résidentielle de l’énergie. Lorsque les propriétaires apprenaient la quantité d’énergie consommée par les membres de la communauté, ils avaient tendance à modifier leur consommation d’énergie pour la rendre conforme à la norme (Schultz, Nolan, Cialdini, Goldstein et Griskevicius, 2007), c’est-à-dire décroître ou augmenter leur consommation d’énergie en conséquence. Heureusement, les chercheurs ont appris que les augmentations pourraient être évitées en donnant aux utilisateurs consommant peu d’énergie un messagepositif sur le fait d’utiliser moins d’énergie.

Les normes peuvent également se développer à travers les réseaux sociaux dans les quartiers ou les lieux de travail. Encore une fois, ceux-ci peuvent être négatifs dans le sens où les schémas comportementaux « anti-climat » peuvent dominer, mais les schémas « pro-climat » peuvent aussi avoir le dessus. Rogers (1983) a documenté un cas où la cartographie des conversations (qui parlait avec qui) et la cartographie de la proximité des habitations se combinaient pour expliquer pourquoi 7 des 44 résidents (16%) avaient installé des panneaux photovoltaïques sur leurs maisons (bien plus que la moyenne nationale de 1%). Les réseaux sociaux peuvent être de puissantes influences favorables aux comportements « pro-climat ».

– Les inégalités perçues
Les (in)égalités perçues sont souvent invoquées comme une raison de ne pas agir: «Pourquoi devrais-je changer si les autres ne changent pas?» Habituellement, des personnalités connues, d’autres secteurs économiques, ou d’autres pays sont citées comme ne jouant pas le jeu et servent de justification à l’inaction. La peur d’être victime de passagers clandestins (Kerr, 1983, Olson, 1965) constitue un obstacle pour certaines personnes qui se demandent pourquoi elles devraient contribuer de manière responsable à la lutte contre le changement climatique lorsqu’(elles (craignent que) d’autres ne le feront pas. Dans les dilemmes expérimentaux liés aux ressources, lorsqu’il existe une sorte d’inégalité ou d’iniquité (réelle ou perçue), la coopération tend à décliner (par exemple, Aquino, Steisel, & Kay, 1992).

  1. Coûts irrécupérables

Si les gens modifiaient très souvent leurs comportements et leurs croyances, leur vie serait plus désordonnée que souhaitable, et ils auraient moins de temps et d’énergie disponibles pour poursuivre les objectifs qu’ils jugent utiles. Ainsi, les investissements en argent, en temps et en comportements sont utiles – sauf quand ils nuisent à l’environnement ou au climat (par exemple, Cunha et Caldieraro, 2009, Leahy, 2009).

– Investissement financier

Une fois que l’on a investi dans quelque chose, il est plus difficile d’y renoncer que si l’on n’y avait pas investi (par exemple, Arkes & Hutzel, 2000, Knox & Inkster, 1968). L’exemple cardinal dans ce contexte pourrait être le fait d’avoir une voiture. Si on a acheté une voiture, qu’on paie son assurance et qu’on surveille sa dépréciation, pourquoi laisser au garage ce « confortable salon roulant », avec ses nombreux avantages perçus (cf. Reser, 1980) ? Les gens ont généralement une « aversion de la perte », et ne souhaitent pas voir cette dépense «jetée par le fenêtre» pour commencer à se déplacer en vélo ou en transports en commun. Les économistes soulignent que le choix rationnel est de renoncer au coût irrécupérable et d’aller de l’avant, mais la plupart des gens choisissent plutôt de s’accrocher à l’investissement irrécupérable, du moins jusqu’à ce que ses inconvénients deviennent trop pénalisant.

Si une personne a un intérêt financier direct dans l’industrie des combustibles fossiles, il sera en dissonance cognitive (Festinger, 1954) s’il entend que leur combustion endommage l’environnement. La dissonance cognitive est souvent plus facile à réduire en changeant d’avis («brûler ces carburants ne pose pas de problème») qu’en changeant de comportement (en renonçant à ses propres investissements dans les énergies fossiles ou en abandonnant son emploi dans cette industrie). Ou, comme l’a remarqué B. F. Skinner (1987), «il est souvent plus facile de s’échapper par d’autres moyens – en ignorant ou en oubliant le conseil ou en trouvant un moyen de s’échapper qui n’exige pas de résoudre le problème» (p.5).

– Inertie comportementale

William James (1890) a désigné les habitudes comme étant « l’énorme volant d’inertie de la société » (p.121), bien qu’il considérait cette stabilité de l’action en termes positifs, comme un mécanisme par lequel la société reste ordonnée plutôt que chaotique. Dans le contexte du changement climatique (et d’autres contextes comportementaux), l’habitude est moins bénigne (Ouellette & Wood, 1998).

L’habitude n’est peut-être pas la barrière la plus glamour, mais elle peut être l’une des plus importantes pour l’atténuation du changement climatique (Hobson, 2003) parce que de nombreux comportements habituels sont extrêmement résistants aux changements définitifs (les habitudes alimentaires par exemple) et d’autres habitudes n’évoluent que très lentement, sur des décennies (par exemple, les taux de tabagisme et l’utilisation des ceintures de sécurité) (Maio et al., 2007). Les habitudes enracinées ne changent pas sans une aide substantielle ; l’amorçage ou même le changement d’attitude n’entraînent souvent pas de changement de comportement. , Les behavioristes utilisent le terme «d’inertie comportementale» (Nevin, Mandell et Atak, 1983), pour exprimer l’idée de la variation de la résistance au changement.

Certains comportements qui constituent des éléments clés de la contribution de l’homme au changement climatique (par exemple, l’utilisation de voitures) doivent beaucoup à l’inertie comportementale et sont donc très difficiles à modifier (par exemple, Bamberg, Ajzen et Schmidt, 2003; Carrus, Passafaro & Bonnes, 2008; Eriksson, Garvill & Nordlund, 2008), bien qu’il ne soit pas impossible de changer de comportement au volant (par exemple, Matthies, Klockner et Preiβner, 2006). Par exemple, forcer temporairement les automobilistes à utiliser des modes de déplacement alternatifs a entraîné des réductions à long terme de l’utilisation de la voiture (Fujii et Garling, 2003).

– Conflit de valeur entre les objectifs et aspirations

Tout le monde a de nombreux objectifs et valeurs, et ceux-ci ne sont pas tous compatibles entre eux ou avec l’atténuation du changement climatique (Lindenberg & Steg, 2007, Nordund & Garvill, 2002, Schwartz, 1992, Stem, 2000; Vining & Ebreo, 1991). Les valeurs pro-environnementales influencent positivement au moins la volonté d’accepter les politiques de changement climatique (McCright, 2009, Nilsson, von Borgstede et Biel, 2004, O’Connor, Bord, Yarnal et Wiefek, 2002), mais elles ne sont pas toujours compatibles avec d’autres valeurs, d’autres objectifs et d’autres aspirations qui conduisent inévitablement à la production de plus de gaz à effet de serre.

Le souhait d’ «aller de l’avant» signifie souvent s’engager dans des actions qui vont à l’encontre de l’objectif de réduction des impacts du changement climatique: acheter une maison plus grande, prendre l’avion par choix, ou conduire une voiture plus grande. On observe que les valeurs et les objectifs environnementaux sont souvent subsidiaires à d’autres valeurs et objectifs lorsqu’on demande aux gens de classer l’importance de l’amélioration du problème climatique par rapport à d’autres problèmes ou préoccupations : ils attribuent peu d’importance au changement climatique (par exemple, Leiserowitz, Kates & Parris, 2005). Adoptant une expression utilisée pour la première fois par Smillie et Helmich (1999) pour décrire le soutien public à l’aide étrangère, Vasi (2009) a caractérisé le soutien public au développement durable et aux actions nécessaires pour réduire le changement climatique comme« très étendu, mais peu profond » (« a mile wide, but an inch deep »). Cette caractérisation est cohérente avec les résultats d’un sondage mené par Pew Research Center Project qui a révélé que 75% à 80% des répondants américains ont déclaré que le changement climatique était un problème important, bien qu’ils l’aient classé 20ème sur 20 («Warming to the Topic», 2009). En résumé, de nombreux citoyens «ne semblent pas se préoccuper du coût économique du changement climatique, tant que cela ne vient pas de leurs propres poches» («Warming to the Topic», 2009, p.4).

– Manque d’attachement à un lieu

Les individus peuvent être plus susceptibles de prendre soin d’un lieu auquel ils se sentent attachés, que d’un endroit auquel ils ne sont pas attachés. Si c’est le cas, un plus faible attachement à un lieu devrait constituer un obstacle à un comportement positif vis-à-vis du climat, et on devrait s’attendre à ce que les populations ayant des antécédents de mobilité géographique se soucient moins de leur environnement actuel. Les preuves liés à cette hypothèse sont mitigées : l’attachement au lieu est parfois (Vorkinn & Riese, 2001) mais pas toujours (Clayton, 2003; Gifford, Scanell et al., 2009; Uzzell, Pol et Badenas, 2002) associées à un comportement pro-environnemental. Le rôle de l’attachement au lieu est susceptible d’être complexe, mais constitue probablement un obstacle à l’action de certaines populations, comme l’indique peut-être l’opposition locale aux parcs éoliens dans certaines régions, même s’il existe un fort soutien pour d’autres politiques environnementales. Par exemple, l’attachement à un lieu fondé sur la nature, plutot qu’un attachement à un lieu fondé sur la citoyenneté, semble être lié au comportement pro-environnemental (Scannell et Gifford, 2010; Vaske et Kobrin, 2001).

  1. Défiance

Lorsque les individus ont un point de vue négatif sur les opinions des autres, il est peu probable qu’ils acceptent de suivre leurs propositions. Ces opinions négatives peuvent prendre diverses formes allant d’un manque général de confiance dans l’autre, à penser que ce que les autres proposent est inadéquat, jusqu’à dénier carrément la véracité des croyances de l’autre, ou à réagir contre ses conseils.

– Méfiance

La confiance est essentielle pour des relations saines. Lorsqu’elle est absente, comme c’est parfois le cas entre les citoyens et leurs scientifiques ou les représentants du gouvernement, il s’ensuit une résistance sous une forme ou une autre. La confiance s’érode facilement, et lorsque les e-mails sont volés et cités de manière sélective, ou qu’un seul scientifique trop zélé exagère les résultats futurs du changement climatique ne serait-ce que dans une seule région, une méfiance généralisée peut apparaître. La confiance est importante pour changer le comportement, et bien que son rôle en tant qu’influence sur le comportement pro-environnemental soit complexe (Gifford, 2007a), en général, le changement de comportement exige que l’on fasse confiance aux autres pour qu’ils n’en profitent pas outre mesure; avoir confiance que le changement est efficace, significatif et équitable (par exemple, Brann et Foddy, 1987, Foddy et Dawes, 2008). Il faut croire que l’autre a le sens de collectif [« le sens du service public », au sens anglosaxon, NDT] et qu’il est honnête (Terwel et al., 2009). En somme, lorsque la confiance s’amenuise, la probabilité d’adopter un comportement positif face au changement climatique diminue.

– Programme perçu comme insuffisant

Les décideurs ont examiné et mis en œuvre de nombreux programmes conçus pour encourager les choix de comportements durables ou respectueux du climat. Cependant, la plupart des programmes liés au climat jusqu’à présent résident dans une action volontaire pour les individus ; peu sont obligatoires ou déclenchent des sanctions quand ils ne sont pas respectés. Ainsi, les citoyens choisissent d’adhérer ou non à un programme et ils peuvent décider que le programme n’est pas assez bon pour leur participation (cf. Pelletier, Dion, Tuson et Green-Demers, 1999). La dissonance cognitive peut se produire ici comme ailleurs ; il peut être plus facile de changer d’avis sur la pertinence d’un programme plutôt que de changer son comportement en participant au programme.

– Déni

L’incertitude, la méfiance et les coûts irrécupérables peuvent facilement conduire à un déni actif du problème (par exemple, Norgaard, 2006). Cela peut inclure le fait de nier que le changement climatique est en cours, nier qu’il a une cause anthropogénique, ou que ses propres actions jouent un rôle dans le changement climatique. Les sondages varient, mais dans la plupart des pays, des minorités importantes croient que le changement climatique ne se produit pas ou que l’activité humaine n’a que peu ou pas de rapport avec elle (McCright et Dunlap, 2010).

Ceux qui partagent ce point de vue ont tendance à être plus véhément que ceux qui acceptent qu’un problème existe. Par exemple, un reportage dans USA Today sur plusieurs présentations environnementales à la convention 2008 de l’American Psychological Association (APA) à Boston (Jayson, 2009) a attiré 115 réponses de lecteurs. Une analyse informelle du contenu des commentaires que Sonya Frey et moi avons menés a montré qu’environ 100 des réponses niaient tout simplement que le problème existe. Deux explications typiques étaient que le changement climatique est un problème inventé par «des scientifiques qui poursuivent un problème fantôme» et que les scientifiques ignorent les recherches «prouvant» que le problème est surestimé ou n’existe pas. Les commentaires d’un lecteur sont typiques de l’intensité émotionnelle ressentie par certains négationnistes du problème :

« Il s’agit d’un groupe de psychologues qui ont besoin d’embrouiller la tête des gens pour les amener à s’aligner sur cette absurdité «éco-responsable».. . . « Les actualités qui donnent une vision équilibrée du changement climatique ont réduit les croyances des gens que les humains en soient responsables. » Eh oui, il n’y a rien d’autre que « les barjots du climat » détestent plus que des reportages équilibrés. »

Un échantillon de 115 commentaires n’est pas représentatif de la population, mais il reflète l’opinion d’un segment de la société prompt à la prise de parole. Après avoir entendu parler du rapport du groupe de travail sur les changements climatiques de l’APA (Groupe de travail de l’American Psychological Association sur l’interface entre la psychologie et le changement climatique mondial, 2009), l’animateur d’une émission populaire sur un important réseau télévisé américain a brandi une copie du livre  Le Meilleur des mondes d’Aldous Huxley, et a dit: « Les psy cherchent de nouveau à nous laver le cerveau. »

De telles déclarations suggèrent que les émotions, y compris la peur, jouent un rôle important dans le déni. Davantage de recherches sur les éléments émotionnels qui sous-tendent le déni du changement climatique et de ses connexions humaines sont nécessaires ; cela aiderait à concevoir des moyens plus efficaces de communiquer sur le changement climatique (Comeau et Gifford, 2011; Marx et al., 2007; Moser, 2007).

La théorie de la gestion de la peur (par exemple, Goldenberg, Pyszczynski, Greenberg et Solomon, 2000) suggère que les gens peuvent nier le problème parce qu’il leur rappelle leur propre mortalité (Vess et Arndt, 2008).

Réactance (préserver sa liberté d’action perçue comme menacée).

De nombreuses preuves suggèrent que beaucoup de gens se méfient des messages provenant des scientifiques ou des responsables gouvernementaux (par exemple, Earle, 2004, MacGregor, Slovic, Mason, & Detweiler, 1994). Certains réagissent fortement contre les conseils ou les politiques qui semblent menacer leur liberté (Brehm, 1966), en partie parce qu’ils sont basés sur un manque de confiance envers ceux qui donnent des conseils ou définissent la politique (Eilam & Suleiman, 2004). Entre autres moteurs, ceux qui ont des conflits d’intérêt avec l’industrie des combustibles fossiles ont cherché, avec un succès grandissant (Newport, 2010), à promouvoir la méfiance vis-à-vis du consensus scientifique sur le changement climatique et à provoquer une opposition aux politiques d’atténuation (voir Hoggan, 2009; 2007, Oreskes & Conway, 2010).

  1. Risques perçus

Qu’est-ce qui pourrait arriver aux personnes qui envisagent de changer de comportement pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre ou améliorer leurs actions liées à l’environnement ? Un changement de comportement (quel qu’il soit) peut potentiellement comporter au moins six types de risques (Schiffman, Kanuk et Das, 2006).

Risque Fonctionnel

Est-ce que cela fonctionnera ? Si l’on achète, par exemple, un véhicule hybride rechargeable (VHR), il pourrait, en tant que nouvelle technologie, avoir des problèmes de batterie. On pourrait en dire autant de nombreuses nouvelles technologies vertes qui existent ou ont été proposées comme solutions d’atténuation ou d’adaptation.

Risque physique

Certaines adaptations peuvent avoir, ou du moins être perçues comme ayant, un certain danger qui leur est associé. Ce VHR (par exemple) est-il aussi sûr que le véhicule utilitaire sport (SUV) qui a été échangé pour acheter le VHR? Pour prendre un autre exemple, voyager en vélo ne produit littéralement pas de gaz à effet de serre, mais cela peut engendrer quelques visites aux urgences [risque 1,5 fois plus élevé qu’en voiture en moyenne, en 2014 en France, en majorité hors agglomération, NDT].

Risque financier

De nombreuses solutions vertes nécessitent des investissements. En combien de temps seront-ils amortis ? Si le produit devient une partie fixe d’une résidence (par exemple, des panneaux solaires), le propriétaire récupérera-t-il les coûts d’installation ou accumulera-t-il suffisamment d’économies d’énergie avant de déménager ? Le prix d’achat d’une voiture électrique comprend probablement un surcoût par rapport aux véhicules à essence équivalents ; l’argent dépensé pour l’acheter et l’exploiter sera-t-il perdu ?

Risque social

Nos choix sont observés par nos proches ; ils deviennent une partie de notre personnalité publique. Cela nous rend vulnérables aux jugements de nos amis et collègues, qui pourraient nuire à notre égo ou à notre réputation. Si j’achète une voiture électrique, est-ce que ces personnes importantes pour moi vont rire ou se moquer de moi dans mon dos ? Ceux-ci pourraient mentionner l’un des trois premiers risques pour critiquer mon choix.

Risque psychologique.

Ce risque, très lié au précédent, est peut-être moins probable pour la plupart des gens, mais arrive parfois. Si quelqu’un est taquiné, critiqué ou même réprimandé par ses proches pour l’achat d’une voiture électrique, il peut perdre de l’estime de soi et de la confiance en lui.

Risque temporel.

Un risque plus courant, peut-être presque universel, est le risque que le temps consacré à la planification et à l’adoption de la nouvelle ligne de conduite ne produise pas les résultats escomptés. On peut penser que pour la plupart des gens, il faut un temps important pour se décider à l’achat d’une voiture électrique, pour devenir végétariens, pour organiser ses déplacements à vélo pour ses activités journalières, ou pour faire tout autre choix d’atténuation significatif. Si le choix n’aboutit pas aux avantages escomptés, le temps consacré à la recherche et à l’achat d’objets indiqués comme « pro-climat »  aura été gaspillé.

  1. Changement de comportement limité

Beaucoup de gens sont engagés dans de petites actions qui limitent les gaz à effet de serre. Certaines personnes sont beaucoup plus actives que d’autres. Cependant, la plupart des gens pourraient faire plus que ce qu’ils ne font déjà, et dans certaines études pilotes, presque tout le monde convient qu’on pourrait faire plus. Deux formes majeures de cette tendance sont le « tokenisme » et l’effet rebond.

-Tokenisme
Une fois que les individus dépassent la torpeur, le déni, l’habitude et le risque perçu, qu’ils pensent avoir un bon contrôle comportemental et qu’ils estiment que leurs communautés d’appartenance auxquels ils ressentent un attachement (naturel), pourrait être menacés, ils peuvent enfin commencer à changer pour un comportement « pro-climat ». Quels sont les changements les plus probables ? Certains comportements liés au climat sont plus faciles à adopter que d’autres, mais ont peu ou pas d’impact sur les émissions de gaz à effet de serre. Cependant, leur facilité d’adoption conduit à ce que ces actions soient choisies par rapport à actions plus efficaces mais plus coûteuses. Cette tendance a également été appelée l’hypothèse de faible coût (par exemple, Diekmann & Preisendorfer, 1992, voir aussi Kempton, Harris, Keith, & Weihl, 1985). L’intention pro-environnementale peut ne pas correspondre à un impact pro-environnemental (Stern, 2000).

– L’effet de rebond.

Un autre problème avec des choix « pro-climat » est l’effet de rebond. Après quelques efforts d’atténuation, les gains réalisés sont diminués ou effacés par des actions ultérieures. Par exemple, les personnes qui achètent des véhicules économes en carburant peuvent conduire plus qu’elles ne le faisaient lorsqu’elles possédaient des véhicules moins efficaces. Le phénomène a également été appelé paradoxe de Jevons (Jevons, 1865) et le postulat de Khazzoom-Brookes (Brookes, 1990 ; Khazzoom, 1980). L’effet rebond a été démontré dans une récente étude de dilemme des ressources dans laquelle les participants qui avaient été avertis du déclin de la ressource ont restreint leurs récoltes pendant quelques saisons, avant de revenir peu après aux niveaux de pré-alerte (Joireman, Posey, Truelove & Parks, 2009 ).

Vers une taxonomie des barrières psychologiques au changement de comportement

 

Les modèles existants

L’ensemble des obstacles que nous venons d’évoquer demandent à être classés. Aucune taxonomie ou modèle de recherche n’a été développé spécifiquement pour les questions relatives au climat, bien que certaines amorces très préliminaires aient été menées (Gifford, 2008, Kollmuss & Agyeman, 2002 ; Lorenzoni et al., 2007). En termes de modèles formels, les plus proches ont été développés pour d’autres finalités, bien qu’ils puissent être utilisés pour la recherche sur le changement climatique. Les plus connus de ces modèles sont la théorie du comportement planifié (TCP ; Ajzen, 1991) et le modèle valeur-croyance-norme (VCN) (Stem, 2000). Le modèle TCP de base comprend des normes subjectives et un contrôle comportemental perçu, et a été largement utilisé dans la recherche sur la santé et la sécurité ainsi que dans la recherche environnementale (par exemple Bamberg et Schmidt, 2003), mais les chercheurs ont démontré qu’il pouvait être amélioré en l’étendant de diverses manières (par exemple, Conner et Armitage, 1998 ; de Groot et Steg, 2007, Haustein et Hunecke, 2007, Heath et Gifford, 2006, Kaiser, 2006). Cependant, même les versions étendues ne parlent pas certains obstacles décrits plus haut.

Le modèle VCN de Stern (2000) commence par les valeurs. Plus les valeurs générales sont liées à la planète et altruistes, plus on devrait croire aux principes fondamentaux du Nouveau Paradigme Écologique, une vision du monde qui envisage la planète comme un système délicat, menacé et interconnecté, qui conduit à la conviction que les actes qui nuisent à l’environnement ont des conséquences néfastes. Cependant, selon le modèle VCN, les gens n’agiront toujours pas de manière pro-environnementale s’ils ne croient pas qu’ils sont capables de réduire ces conséquences néfastes. Si les deux points précédents sont validés, une personne devrait alors avoir un sens de l’obligation et développer la norme pour s’engager dans l’un des quatre types d’actions pro-environnementales: militantisme environnemental, comportements publics non militant, comportements privés, et actions au sein d’une organisation. La théorie VCN a également reçu un soutien empirique; on a pu montrer qu’il modélise fidèlement les comportements environnementaux non militants (par exemple, Steg, Dreijerink et Abrahamse, 2005).

Quatre autres modèles de changement de comportement ont reçu moins d’attention mais méritent d’être mentionnés. Le modèle DO-RITE de Geller (1992) évite les attitudes, les valeurs et d’autres concepts mentaux en faveur d’un comportement observable et d’une intervention, comme suit: Définir (D) le comportement cible à modifier; observer (O) le comportement de la cible; enregistrer (R) le taux d’occurrence du comportement; intervenir (I) avec un programme qui change les conséquences de s’engager dans ce comportement; tester (T) l’impact du programme en comparant la fréquence du comportement avant et après le programme; et évaluer (E) le programme. Le modèle de Grob (1995) se concentre sur les valeurs, la conscience, les émotions et le contrôle perçu. Le modèle de Pelletier et al. (1999) est centré sur l’impuissance mondiale, suggérant que les individus croient qu’ils n’ont pas de stratégies efficaces pour résoudre le problème, la force suffisante pour résoudre le problème, ou la capacité de soutenir un effort suffisant pour résoudre le problème. Frantz et Mayer (2009) ont adapté le modèle d’intervention en cinq étapes de Latané et Darley (1970), qui comprend la prise de conscience du problème, le fait de considérer la situation comme une urgence, de se sentir responsable, de savoir quoi faire, et d’agir.

Parcimonie contre exhaustivité

En tant que familles de sept genres différents comprenant 29 espèces, les dragons de l’inaction soulèvent implicitement la question de savoir si les modèles existants sont trop simples. La parcimonie est une vertu cardinale, mais les modèles existants pourraient-ils sacrifier des éléments importants dans la poursuite de cette vertu ? Si la recherche d’une plus grande compréhension et de sa manifestation pratique, le pouvoir prédictif, sont aussi des vertus, alors davantage de membres de la famille des dragons devraient avoir leur place dans les modèles et les théories du comportement « pro-climat ». La taxonomie préliminaire du Tableau 1, un ensemble plus inclusif d’obstacles au changement, devrait permettre aux chercheurs de réfléchir, offrir des suggestions aux modélisateurs, et susciter la réflexion chez les décideurs.

Ces dragons du Tableau 1 ne sont pas des créatures solitaires. Ils interagissent certainement. En effet, leur «ADN» est sans doute partagé dans certains cas. La comparaison sociale est probablement liée au risque social. La méfiance doit souvent sous-tendre le déni. La technosalvation pourrait bien supposer l’inadéquation perçue du programme. Les inégalités perçues sont probablement associées à la réactance. Cependant, les constructions associées ne sont pas nécessairement des constructions redondantes. Mes collègues et moi-même avons commencé à discerner les liens et les interactions dans cette famille (Gifford, Iglesias, & Casler, 2009). Une fois que leurs interrelations empiriques seront mieux connues, elles devraient améliorer de manière significative la compréhension et la prédiction des comportements « pro-climat » et « anti-climat ». À son tour, cette compréhension accrue devrait mener à l’avancée des actions climatiques positives.

Motivations et émotions

Bien que des formes spécifiques de motivation aient été identifiées et que la motivation soit manifestement une dimension humaine importante (par exemple, Deci et Ryan, 2000; Goldenberg et al., 2000), l’hypothèse actuelle est que les obstacles mènent collectivement à une absence de motivation générale pour agir. La suppression des barrières augmenterait les actions efficaces. Les émotions, dans la formulation actuelle, sont considérées comme des aspects intégraux de certaines barrières : la peur fait vraisemblablement partie du risque perçu, par exemple, et la colère fait vraisemblablement partie de la réactance, de l’équité perçue et de l’exigence de justice.

D’autre part, l’émotion ne semble pas être un aspect central de beaucoup d’autres barrières, telles que l’habitude, le tokénisme, l’actualisation, l’ignorance ou l’effet rebond. Certaines données suggèrent que même si les systèmes cognitifs sont engagés dans le changement climatique, les systèmes affectifs ne le sont pas (Weber, 2006), bien qu’ils soient parfois prédictifs (Grob, 1995). D’autres données suggèrent que l’affect n’est important que lorsque l’attitude d’un individu envers un comportement favorable à l’environnement est faible (Smith, Haugtvedt, & Petty, 1994). Ainsi, en somme, la motivation semble être partout ou nulle part ; et si l’émotion n’a pas un grand rôle dans la plupart des barrières, elle peut être importante si notre attitude envers le changement climatique n’est pas fortement marquée.

Conclusion

Certaines contraintes structurelles clefs font obstacle aux changements de comportements qui contribueraient à limiter le dérèglement climatique, mais de nombreuses barrières psychologiques subsistent également pour les personnes qui ne sont pas confrontées à ces obstacles structurels rigides. Beaucoup de gens agissent déjà en réponse aux défis du changement climatique, mais beaucoup d’autres sont entravés par un ou plusieurs de ces obstacles à l’action. Les barrières structurelles devraient être éliminées par des forces telles que la législation et le renouvellement urbain, mais cette action ne sera probablement pas suffisante. Les psychologues et autres spécialistes des sciences sociales ont un rôle important à jouer si l’on veut surmonter les nombreux obstacles psychologiques (par exemple, Gifford, 2007b, 2008 ; Spence, Pidgeon et Uzzell, 2009 ; Vlek, 2000).

La recherche et la pratique sont encore nécessaires pour examiner chaque barrière de plus près dans le contexte du changement climatique. Quelques pistes suivent. D’abord, des connaissances théoriques de qualité informent et dirigent le progrès scientifique ; la taxonomie proposée ici devrait être examinée et améliorée si nécessaire. Certains dragons n’ont peut-être pas encore été trouvés, et des études empiriques pourraient bien déceler des liens significatifs ou des chevauchements entre les différentes espèces. Deuxièmement, l’étendue des obstacles rencontrés par les individus dans différents groupes et contextes devrait être examinée. On peut supposer que différents segments de la population et divers groupes culturels connaissent des obstacles différents et réagiront donc différemment aux différents types de messages, de politiques et d’interventions. La clarification de ces différences augmentera l’efficacité des efforts d’atténuation du dérèglement climatique. Troisièmement, on pourrait s’attendre à ce que, face à de multiples barrières cumulées, la non-motivation d’un individu augmente ; cette proposition pourrait être testée. Quatrièmement, le déni demeure une barrière particulièrement troublante pour les scientifiques sociaux et les climatologues, car le changement de comportement ne peut pas se produire tant que le problème n’est pas considéré comme un problème. Cinquièmement, d’autres recherches sont nécessaires pour mieux comprendre comment les individus peuvent surmonter ces obstacles. Par exemple, l’intégrité scientifique exige des intervalles de confiance, mais les intervalles de confiance invitent à l’inaction pour de nombreuses personnes. Sixièmement, chercher des occasions de promouvoir les interactions sociales pour diffuser l’adoption de choix technologiques adaptatifs qui atténuent le changement climatique (Rogers, 1983). Les psychologues sont ingénieux et optimistes. Les dragons de l’inaction peuvent être repoussés, voire terrassés. Cinq stratégies principales peuvent aider à surmonter les obstacles décrits dans cet article:

Analyser les barrières spécifiques au niveau comportemental.Définir très précisément le comportement qui empêche les individus de choisir des actes plus respectueux du climat dans les transports, la nourriture, l’énergie et d’autres aspects de notre vie liés au carbone, puis observer et enregistrer, intervenir, tester l’impact de l’intervention et évaluer le programme (Geller, 1986, 1992). Au niveau sociétal, Skinner (1987, p.7) a implicitement appelé à reprendre le contrôle des «forces de la vie quotidienne», accaparés par les gouvernements, les religions et les systèmes capitalistes, tant que les «contingences de sélection» immédiates sont en conflit avec l’intérêt collectif de long terme pour nous tous.

  • Après avoir créé de meilleurs outils de mesure du coût du carbone associé aux divers choix de comportement (en coopération avec d’autres scientifiques), créer de meilleurs moyens de transmettre l’information aux consommateurs et aux citoyens, en utilisant les meilleures pratiques de prise en compte du facteur humain dans la conception des machines que nous utilisons. (Abrahamse, Steg, Vlek et Rothenberg, 2007).

 

  • Améliorer la compréhension des éléments essentiels pour obtenir un soutien du public et une opposition aux politiques et technologies qui engendrent le changement climatique. Cela inclus : optimiser les stratégies de communication en général et pour des segments de population particuliers, et tester la diffusion des processus d’innovation dans des réseaux sociaux (par exemple, Maibach, Roser-Renouf et Leiserowitz, 2008 ; Moser et Dilling, 2004). Par exemple, dans le cadre d’une enquête téléphonique menée auprès de 1 000 résidents de l’Ontario, on a constaté que les messages qui émancipent (ndt empowerment) produisaient plus d’action pro-climat que les messages qui parlent de « sacrifices » (Comeau et Gifford, 2011).
  • Concevoir et mener davantage d’études d’intervention visant d’importants choix de comportement liés au carbone, tels que le choix du mode de déplacement et la consommation d’énergie (par exemple, Steg et Vlek, 2009).
  • Travailler en étroite collaboration avec d’autres disciplines, avec les agences gouvernementales et avec des experts techniques ; l’atténuation du changement climatique ne peut être accompli par un groupe de discipline isolé, quelle que soit le talent de ses membres (par exemple, Schoot Uiterkamp & Vlek, 2007).

Comme dans d’autres domaines de comportement qui étaient fortement résistants au changement de comportement, par exemple le tabagisme et l’utilisation de ceintures de sécurité, les dragons de l’inaction peuvent être surmontés, même si l’effort prendra du temps et que le changement ne sera jamais parfait. Cependant, grâce à une combinaison de messages ciblés, un leadership efficace, des connaissances techniques améliorées, des politiques équitables, des infrastructures, l’élaboration de normes, la définition d’objectifs raisonnables, des retours d’information, la diffusion des normes sociales via les réseaux sociaux, et des récompenses personnelles appropriées, cela peut être obtenu. Ces étapes doivent être prises rapidement ; il se peut que nous n’ayons pas les quatre ou cinq décennies nécessaires pour que la plupart des gens cessent de fumer et portent une ceinture de sécurité, pour nous débarrasser des gaz à effet de serre, gérer les blessures que cela aura déjà causé et prévenir des conséquences encore plus graves.

 

 

[1] Ces obstacles peuvent bien limiter le changement pour d’autres comportements gênants dans d’autres domaines, mais une discussion de ces domaines sera pour un autre article.

[2] Dans la mythologie, les dragons prennent un large éventail de formes, et chez les asiatiques les dragons sont même bienveillants, comme je l’ai appris d’une femme lors d’une conférence à Sapporo. Cependant, en tant qu’occidental, j’utilise les dragons comme une métaphore pour ces obstacles parce que peu importe leur forme ou apparence, les dragons occidentaux semblent toujours bloquer les humains dans leurs buts ou aspirations. Une autre raison, moins évidente mais complémentaire, de ce choix réside dans le mot lui-même: Les obstacles se prolongent (ndt « drag on » en anglais).

[3] Certains comportements aident à atténuer le changement climatique, même de manière involontaire.Par exemple, on peut faire du vélo pour aller travailler pour des raisons de santé ou pour économiser de l’argent, ou on peut éviter de prendre l’avions afin de passer plus de de temps avec sa famille (Whitmarsh, 2009). Le but initial n’est pas le changement climatique. Par opposi[1] 1 Ces obstacles peuvent bien limiter le changement pour d’autres comportements gênants dans d’autres domaines, mais une discussion de ces domaines sera pour un autre article.